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Exclusivité Netflix, "Le cercle des neiges" s'impose comme un puissant film de survie

Une scène du film "Le cercle des neiges" de Juan Antonio Bayona. [Netflix]
Une scène du film "Le cercle des neiges" de Juan Antonio Bayona. - [Netflix]
Dans "Le cercle des neiges", le cinéaste espagnol Juan Antonio Bayona nous plonge au coeur du cauchemar vécu par les passagers de l'avion écrasé, en 1972, dans la cordillère des Andes. Un fait divers devenu célèbre à cause de l'anthropophagie que les rescapés du crash ont dû pratiquer pour survivre.

Octobre 1972. Les membres de l'équipe de rugby uruguayenne des Old Christians embarquent à bord d'un vol en direction du Chili au moment où la jeunesse manifeste contre le pouvoir local. Quelques heures après le décollage, l'engin s'écrase dans la cordillère des Andes.

Confrontés au froid, puis à la faim, les survivants abandonnent l'idée d'une mission de sauvetage et, poussés à bout après moult résistances éthiques, trouvent leur salut en consommant la chair des nombreux cadavres récupérés.

Mais alors que le groupe s'organise au mieux dans l'abri que leur offre la carlingue de l'avion, une avalanche met à mal leurs chances de survie. Seuls seize passagers sur quarante-cinq sortiront vivants de cette tragédie aux allures de cauchemar sans fin.

>> A relire : Cinquante ans après, deux survivants du "crash des Andes" racontent leur calvaire

Une expérience éprouvante

Après deux documentaires, une fiction mexicaine datant de 1976 et "Les survivants", une production très américanisée sortie en 1993, "Le cercle des neiges" raconte une nouvelle fois ce fait divers réputé en adoptant toutefois un point de vue inédit et remarquable sur son sujet. Respectant la langue et les origines de ses protagonistes, le film colle au plus près aux survivants du crash tout en évitant un voyeurisme inutile lié à l'anthropophagie qui sauvera certains d'entre eux.

Alliant l'ampleur de son décor enneigé, à la fois sublime et hostile, à une proximité poignante avec ses personnages, le résultat ne se contente pas de nous immerger dans l'une des expériences de survie les plus éprouvantes et viscérales qu'il nous ait été donné de voir; il tisse un groupe, un cercle, une société humaine dont tous les membres, morts ou vivants, resteront à jamais soudés.

Symbolique chrétienne récurrente

Autant à l'aise dans le grand spectacle ("Jurassic World") que dans les récits fantastiques plus intimistes ("Quelques minutes après minuit", "L'orphelinat"), le cinéaste espagnol Juan Antonio Bayona parvient à nous faire éprouver de bout en bout le chemin de croix de ses survivants, unis par la voix off d'un personnage, Numa Turcatti, qui narre l'ensemble du récit avant d'emmener le film vers une dimension crépusculaire aussi inattendue que bouleversante.

Entre le nom même de l'équipe de rugby, une scène inaugurale dans une église, la dimension sacrificielle des morts dont la chair est mangée comme lors d'une Eucharistie non plus symbolique, mais littérale, et une image finale qui réinterprète la Cène de De Vinci, "Le cercle des neiges" développe qui plus est une symbolique chrétienne récurrente.

Un hommage aux vivants et aux morts

Cette imagerie aurait pu paraître simpliste si elle avait visé une forme de transcendance religieuse au lieu de se rattacher à quelque chose de plus humain, de plus terrestre, de plus élégiaque. Même la question de la foi paraît ici plus complexe, tant le miracle ou la présence de Dieu n'expliquent ici en rien pourquoi une poignée d'hommes ont survécu à une telle catastrophe.

Dans sa volonté permanente d'inscrire à l'image le nom et l'âge des disparus au moment de leur décès, le film trouve son coeur véritable et puise moins sa force inouïe dans une leçon de courage et d'héroïsme que dans un hommage vibrant aux vivants comme aux morts.

Rafael Wolf/ld

"Le cercle des neiges" de Juan Antonio Bayona, avec Enzo Vogrincic, Matías Recalt, Augustin Pardella. A voir sur Netflix.

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