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"Deadpool et Wolverine", castagne, sang et blagues salaces au programme

Une scène du film "Deadpool & Wolverine". [Marvel Studios 2024]
Une scène du film "Deadpool & Wolverine". - [Marvel Studios 2024]
Alors que l’univers Marvel est en perdition au box-office, le troisième opus de la franchise "Deadpool" arrive sur les écrans pour marteler que le super-héros le plus graveleux et déjanté de tous va sauver l’écurie du naufrage. Mais malgré le carton annoncé, le film en dents de scie déçoit.

Les super-héros sortent leurs griffes de métal, affûtent leurs katanas et ne sont pas là pour plaisanter. Quoique! Avec Deadpool, le plus vulgaire et effronté de tous, les bons mots de mauvais goût fusent de toute part. Si sur le papier l’idée d’associer ce dévergondé Deadpool au dépressif Wolverine peut séduire, sur la toile c'est la déception qui l’emporte.

Un premier élément laissera perplexe même les plus convaincus: Wolverine est mort et enterré dans le film "Logan" qui lui était consacré. La scène de pré-générique de "Deadpool 3" ne laisse planer aucun doute là-dessus: Deadpool exhume la dépouille d’acier du X-Men et se désespère! Sans spoiler, Hugh Jackman l’avait dit: "Ce n’est pas le même Wolverine!", une justification en forme de pirouette pour expliquer cette résurrection. Oui Logan - alias Wolverine - est mort, mais oui aussi, son retour s’inscrit dans un scénario cohérent, même si tiré par les toiles de Spiderman ou les cheveux de Docteur Strange.

Un scénario sans surprises

Cet Wolverine-là vient d’un autre univers. La belle aubaine! En reprenant cette idée des multivers déjà exploitée dans d’autres franchises, les scénaristes de "Deadpool 3" ne font que se répéter. De quoi provoquer l’ennui abyssal chez le spectateur avide de surprises.

Mais un blockbuster de super-héros est-il destiné à créer la surprise? Sans doute pas. Alors autant oublier l’originalité et s’embarquer sur les rails bien pratiques de la facilité, en donnant à voir ce que les fans veulent voir: des combats, des cabrioles, du sang qui macule l’écran et des vannes qui feront saigner les oreilles les plus chastes.

Ceci posé, reste à dérouler une aventure musclée. Sans trop en dire pour préserver le peu de surprises que réserve l’intrigue, Wade Wilson mène une vie minable après avoir déposé au vestiaire son costume de Deadpool jusqu’à ce que Paradox, un fonctionnaire de la TVA, le fameux Tribunal des Variations Anachroniques chargé de gérer l’espace-temps et les multivers, lui propose une mission.

Au lieu de répondre à ses attentes, Deadpool, avec l’aide d’un Wolverine moins dépressif et moins alcoolique que les autres, entend bien sauver son monde menacé de destruction. Reste juste à convaincre le X-Men de le suivre dans cette aventure.

Un Deadpool fatigant

A grand renfort d’effets spéciaux, Deadpool et Wolverine vont se battre tout en décimant moult ennemis. Pas franchement convaincant. Deadpool a pris un melon insupportable, de quoi largement agacer! Car tout est dans le dosage, et malheureusement ici, c'est raté: ce qui fonctionnait à merveille jusqu’à présent devient contre-productif.

Très vite, l’envie de traverser le quatrième mur pour le faire taire monte en puissance tellement Deadpool devient fatigant. A l’instar d’un Logan qui s’énerve devant ce moulin à paroles impossible à stopper, plus le film avance, plus l’envie de lui tordre le cou s’amplifie.

Que Deadpool se la raconte en taclant la Fox, en se vantant de devenir le sauveur de Disney et de Marvel, pourquoi pas, tant les chiffres du box-office lui donnent raison. Malgré un classement R aux Etats-Unis, signifiant des séances interdites aux moins de 17 ans non accompagnés, jamais un film de super-héros n’a autant cartonné ces dernières années en salles. Mais fallait-il vraiment le transformer en un prétentiard aussi lamentable?

Un film déséquilibré

"Deadpool et Wolverine" souffre aussi d’un réel déséquilibre. Autant certaines longueurs dans l’exposition des tenants et aboutissants feront bailler, autant certaines scènes, dont un travelling latéral pour immortaliser un carnage dans un bus et dans la rue, laisseront sans voix. Quelques autres bonnes idées jalonnent le film, comme ce clin d’œil au furieux "Furiosa" de Miller, sans compter les nombreux caméos.

Finalement, Shawn Levy, après son sinistre machin produit pour Netflix "Toute la lumière que nous ne pouvons voir", ne s’en tire pas trop mal. Il a trouvé là une belle matière pour s’éclater et éclater les novices comme les fans les moins regardants.

Philippe Congiusti/aq

"Deadpool et Wolverine", de Shaw Levy, avec Ryan Reynolds et Hugh Jackman. A voir dès le 24 juillet 2024 dans les cinémas romands.

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