Après "Les héros ne meurent jamais", qui se déroulait entre la France et la Bosnie, la réalisatrice Aude Léa Rapin signe "Planète B", un film d'anticipation à la croisée de la science-fiction et du thriller.
En 2039, à Grenoble, des militants écologistes disparaissent après avoir été arrêtés. Julia Bombarth (Adèle Exarchopoulos) se trouve parmi eux. A son réveil, elle se découvre enfermée dans un monde totalement inconnu: Planète B. Dans cet endroit qui se révèle être une prison virtuelle, les militants sont régulièrement soumis à des tortures psychiques.
La science-fiction pour mieux cerner notre époque
"C'est un film qui a commencé à s'écrire pendant le vide qui succédait à la crise des gilets jaunes en France et qui s'est poursuivi avec le retour de la guerre sur le sol européen. [...] Et ce pas de côté que permet la science-fiction pour parler d'aujourd'hui m'a semblé extrêmement nécessaire, vu l'époque que l'on traverse", indique la réalisatrice dans l'émission Vertigo du 25 décembre.
Pour Aude Léa Rapin, l'usage de la science-fiction permet non seulement de mieux appréhender notre temps, mais également de s'adresser "à une jeunesse qui évolue et qui grandit dans cette époque très instable où parler du futur, même proche, est complexe et très incertain."
Deux femmes fortes
Le film s'appuie sur deux personnages de femmes, "une rareté dans le paysage de la science-fiction", souligne la réalisatrice. Chacune à leur façon, elles constituent des figures de la résistance, à commencer par Julia Bombarth, interprétée par Adèle Exarchopoulos, intimement confrontée à l’effondrement climatique. La Genevoise Souheila Yacoub incarne quant à elle Nour, une migrante irakienne qui survit sous la menace permanente de l’expulsion.
"Ces deux personnes qui ne parlent pas la même langue, chacune avec un destin extrêmement empêché, voire brisé par la dureté et la difficulté dans laquelle elles se trouvent, vont faire cause commune ensemble, malgré les obstacles qui les séparent", détaille Aude Léa Rapin.
2040, une date de bascule
L'année 2039, pendant laquelle se déroule le film, n'a pas été posée au hasard. 2040 constitue en effet la date de bascule des rapports du GIEC. "Dans le cas où [...] les crises se multiplient et rendent nos conditions de vie de plus en plus dures, qu'est ce qu'on va faire de ça?, s'interroge la cinéaste. Si la population s'élève partout, car elle manque d'eau, parce qu'elle respire l'air pollué et mange des choses qui portent atteinte à la santé, comment va-t-on faire pour contenir une possible très grande opposition? [...] Est ce qu'il n'y aura que la police à envoyer à ces gens?"
Les jeunes en particulier intéressaient la cinéaste. "Qu'est-ce que ce serait d'avoir 20 ans dans un monde qui périclite, qui bascule et comment cette jeunesse déciderait-elle de prendre son destin en main? Il fallait dessiner cela de la manière la plus réaliste possible, en utilisant des choses qui existent, en tirant les curseurs un petit peu plus loin pour y réfléchir ensemble. Mais j'espère que cela se passera beaucoup mieux que dans le film pour les jeunes de demain", conclut la réalisatrice.
Propos recueillis par Pierre Philippe Cadert
Adaptation web: Melissa Härtel
"Planète B" d'Aude Léa Rapin, avec Adèle Exarchopoulos, Souheila Yacoub, Eliane Umuhire, India Hair, Paul Beaurepaire, à voir depuis le 25 décembre 2024 sur les écrans romands.