Dans "Fuocoammare" ("La mer en flammes"), le réalisateur Gianfranco Rosi aborde le drame de l'immigration à travers les habitants de l'île au sud de la Sicile, devenue tristement célèbre en raison de l'arrivée massive de migrants sur ses rives et des naufrages au large de ses côtes.
Il a passé plus d'une année à Lampedusa pour réaliser ce documentaire extrêmement soigné, tant au niveau des images que de la narration, et qui ne ressemble en rien à un reportage d'actualité consacré à la crise des migrants.
Pour plonger le spectateur dans le quotidien des habitants de l'île, Gianfranco Rosi a choisi au final de raconter cette actualité dramatique via les yeux d'un enfant. Il suit ainsi Samuele, un garçon de 12 ans issu d'une modeste famille de pêcheurs. C'est justement le coup de maître de Rosi.
Le réalisateur explique toutefois qu'il s'est lancé dans ce film sans savoir où cette histoire allait l'emmener au départ: "Tout ce que je savais, c'est que le protagoniste du film devait être un enfant et quand j'ai trouvé Samuele, j'ai compris que ce serait lui le narrateur".
"Les pêcheurs incarnent l'esprit de Lampedusa"
Pourquoi? "Il est fils de pêcheur. Il y a la peur de la mer, du bateau, lui qui vit sur une île... Tout le ramène à sa passion de la terre ferme, la chasse, la forêt, les arbres. Et le personnage de Samuel incarne la dichotomie qu'il y a avec ce monde de pêcheurs qui l'entoure. Ces pêcheurs dont l'esprit incarne l'île de Lampedusa. Ils acceptent tout ce qui vient de la mer. C'est pour cela que cette représentation des pêcheurs est fondamentale dans ce film".
Parmi les autres témoignages, il y a aussi celui du médecin de Lampedusa, le Dr Bartollo, confronté à des drames d’une ampleur inédite et bien obligé d'y faire face avec les moyens à sa disposition.
Dans le film qui sortira le 28 septembre en Suisse, c'est lui qui fait le trait d'union entre deux mondes qui ne se rencontrent jamais: celui des migrants et celui de l'île. Et cette séparation s'est encore accentuée avec l'instauration, il y a quatre ans, de cette frontière mobile en mer qui s'est successivement appelée Mare Nostrum, Frontex, Triton. Où les bateaux de l'Union européenne interceptent les embarcations qui se dirigent vers Lampedusa.
J’ai vu des gens mourir sur ce bateau. Et le capitaine m'a obligé à filmer ça. Il m'a dit: "C’est un devoir pour toi de le filmer et de le montrer aux gens".
Sophie Iselin/olhor
Le documentaire représentera l'Italie aux Oscars
"Fuocoammare" a été choisi pour représenter l'Italie aux prochains Oscars dans la catégorie Meilleur film étranger. "C'est une candidature de poids car le film affronte avec dureté et poésie un sujet universel", a réagi le ministre italien de la Culture, Dario Franceschini. L'Italie a remporté l'Oscar du meilleur film étranger une quinzaine de fois, dont la dernière en 2014 avec "La grande Bellezza" de Paolo Sorrentino. (afp)