Maître de l'ultra violence et du rigorelo (films où le gore est tellement grotesque qu'il en devient rigolo), souvent taxé de misogynie, l'énigme Takashi Miike est pourtant capable d'essais très poétiques. Certes, le phénomène est rare pour cet insatiable qui a signé plus de 100 films en 26 ans, navigant entre commandes et œuvres personnelles. "Dead Or Alive", "Visitor Q", "Ichi The Killer", "Audition" sont quelques-uns de ses mémorables faits d'armes.
Surtout connu pour son goût immodéré pour la boucherie, Takashi Miike San va parfois tellement loin dans la représentation de l'ultra violence qu'il subit la censure. Showtime, diffuseur de la série d'épouvante "Les maîtres de l'horreur", a refusé de programmer sur la TV américaine son épisode, le 13e de la saison 1, intitulé "La maison des sévices", dans lequel il repoussait les limites du soutenable jusqu'à un point jamais atteint dans une production télévisée, reléguant les Argento, Dante, Carpenter et compagnie au rang de maîtres de la mièvrerie pour mauviette.
Takashi Miike au NIFFF: un événement de taille
La grande histoire d'amour entre le NIFFF et Takashi Miike a pu enfin se conclure en 2017 puisque le chouchou du festival a foulé le sol neuchâtelois avec toute sa délégation. Quand le maître débarque, il vient avec ses proches collaborateurs, une équipe de making of, une télévision japonaise qui suit l'équipe de making of qui tourne des images de Miike en promo en Suisse, le tout devant les caméras amusées de nos collègues de SRF suivant cet intrigant cirque.
Il faut dire que l'évènement est de taille. Miike a choisi le NIFFF pour dévoiler en première mondiale le film le plus attendu au Japon en 2017: "Jojo's bizarre adventure".
Dans ce manga à succès de Araki, Josuke dit Jojo, qui ne supporte pas que l'on moque sa coiffure improbable, et un gars de la famille Joeystar (rien à voir avec le rappeur) vont affronter un bien vilain garçon. Au menu, beaucoup d'humour, pas de sang. Des effets spéciaux minimalistes pour matérialiser les super pouvoirs de chacun, et notamment les stands, la force intérieure de ces bagarreurs. Miike se retient et met en boîte un film large public calibré pour affoler le box-office japonais dès le 4 août.
Philippe Congiusti/ld
Festival International du Film Fantastique de Neuchâtel (NIFFF) du 30 juin au 8 juillet.
Des films qui marqueront le 7e art
Takashi Miike était présent à Neuchâtel pour présenter deux autres morceaux de choix, adaptés également de manga, dont la comédie déjantée super pop, "The Mole Song". À côté de cette pépite ultra kitch au ton parfois débile, mais jubilatoire, les amateurs de film de sabres aiguisés et bien sanglants seront restés baba devant "Blade le Sang de L'immortel".
Les mains, les jambes, les têtes tombent comme des mouches alors que les geysers de sang inondent l'écran. Dans ce film de vengeance, un samouraï dépressif condamné à la vie éternelle aide une adolescente bornée à tuer les membres de la triade qui ont assassiné ses parents sous ses yeux. Takashi Miike signe des scènes de bagarre d'anthologie qui marqueront l'histoire du 7e art.
La surenchère et le second degré font de cette plaisanterie délirante le film de Miike le plus réussi depuis pas mal de temps.