Modifié

"Dunkerque", de Christopher Nolan, filmé en pellicule 70 mm, sort en salles

Il est nécessaire de numériser les films sur pellicule avant qu'il ne soit trop tard. [AFP - Eric Cabanis]
Christopher Nolan fait le choix de la pellicule 70 mm pour "Dunkerque" / Tout un monde / 7 min. / le 18 juillet 2017
Le cinéaste Christopher Nolan, très attaché à l'expérience du spectateur, à la qualité de l'image et à la conservation des oeuvres, a choisi de filmer "Dunkerque" presque entièrement sur de la pellicule 70 mm.

Le film sort en salles mercredi. Mais on ne verra pas "Dunkerque" en 70 mm sur nos écrans en Suisse. Non pas en raison d'un retard technologique. Cette méthode de projection, format star des années 50 à 70, a disparu, tout comme le savoir-faire.

Une qualité d'image inégalable mais coûteuse

Christopher Nolan a choisi de tourner son dernier opus en 70 mm car son grain d'image est tout simplement inégalable. Le réalisateur américano-britannique n'en est pas à son coup d'essai. Il avait déjà tourné une partie d'"Interstellar" avec cette pellicule.

Les gens ont souvent du mal à comprendre à quel point l'œil humain est sophistiqué et comment il se développe. Par exemple, les gens de ma génération, qui ont grandi dans les années 80 et 90, peuvent dire quelques secondes après avoir allumé la télévision s'ils regardent un film de cinéma, les nouvelles, une série ou une publicité. Tout le monde est fortement sensibilisé aux différentes technologies de l'image même s'ils ne les comprennent pas forcément. Il est indiscutable que ça a un effet sur la façon dont l'histoire est perçue. C'est une composante très puissante de ce que le cinéma a toujours été.

Christopher Nolan, réalisateur de "Dunkerque", au micro de la BBC

Et malgré une qualité d'image exceptionnelle, cette méthode a peu de chances de concurrencer le numérique, selon les spécialistes. Les explications de Jan-Christopher Horak, qui collabore avec Christopher Nolan au Comité américain pour la préservation des films, directeur des archives à l'Université de Los Angeles UCLA:

"Est-ce que ça va prendre le dessus sur toutes les productions? Non! La réalisation de films en 70 mm est plus chère que le numérique. Seule une grosse production peut se le permettre. Vous n'allez pas faire un petit film indépendant en 70 mm. 70 mm a toujours été le format pour les grosses productions comme par exemple "Lawrence d'Arabie" de David Lean. Mais même à l'époque, les petits films étaient tournés en 35 mm. Et je suspecte que les producteurs vont continuer à utiliser des caméras numériques parce que c'est plus facile à travailler. Et certains reviendront au 35 mm car la qualité d'image est totalement différente".

Un plus pour l'archivage du patrimoine cinématographique

Outre la qualité de l'image, la pellicule a d'autres avantages, le retour à l'utilisation d'un support physique, la cellulose, pourrait résoudre l'un des grands enjeux de l'industrie au XXIe siècle, celui de l'archivage du numérique.

"Nous avons encore désespérement besoin de la pellicule comme moyen de préservation parce que l'information digitale a une durée de vie très courte. Trois à cinq ans seulement. Pour les archives, c'est une période beaucoup trop courte. L'industrie du cinéma a besoin de supports physiques comme la pellicule car on sait qu'elle restera en bon état durant 500 voire mille ans si elle est stockée correctement. Donc pour nous, il n'y a pas de discussion. Utiliser la pellicule est très important pour protéger ce patrimoine. Même les gros studios qui utilisent intensément le numérique notamment pour les dessins animés transfèrent leurs fichiers numériques sur un négatif car ils savent que la pellicule va pouvoir être conservée mais pas le numérique", note encore Jan-Christopher Horak.

Kodak cherche à se positionner sur ce renouveau

Kodak a bien compris cet enjeu du numérique. Après avoir traversé de grosses difficultés financières suite à l'arrivée du digital, l'entreprise américaine cherche à se positionner sur cet éventuel retour du marché de la pellicule cinématographique, explique Jan-Christopher Horak:

"Pour "Dunkerque", Kodak s'est rapproché des producteurs pour produire le matériel. Ils ont notamment fourni les laboratoires et ils espèrent continuer ainsi à l'avenir. Ils vont aussi, et c'est un développement très intéressant, réintroduire les films Super 8. Ils ont fabriqué une nouvelle caméra Super 8 qui va sortir cette année."

Il n'y a pas qu'en Suisse que les spectateurs seront privés de ce 70 mm pour voir "Dunkerque". Il n'y a que 125 salles dans le monde à être équipées pour diffuser ce format.

Cynthia Racine/hof

Publié Modifié

Un film inspiré de l'opération méconnue "Dynamo"

Prises en étau dans le nord de la France par les troupes allemandes, les forces alliées cherchent à évacuer vers l'Angleterre: du 26 mai au 4 juin 1940, l'opération "Dynamo" est lancée sur les plages de Dunkerque, sous le commandement de l'amiral britannique Bertram Ramsay. Cet épisode de la Deuxième Guerre mondiale, beaucoup moins connu en France qu'il ne l'est en Grande-Bretagne, est au coeur du dernier film "Dunkerque".

En neuf jours, pas moins de 338'220 combattants sont évacués dans des conditions inouïes: le gouvernement britannique réquisitionne près de 370 petites embarcations civiles, baptisées "Little Ships". L'opération parait simple. Mais elle a vite été compliquée par les attaques des avions ennemis. Le 4 juin 1940, le dernier navire britannique, le Shikari quitte Dunkerque, laissant derrière lui 35'000 soldats qui n'ont pas réussi à embarquer. (afp)