Comment mettre en images un fait divers tragique? Dans la collection "Ondes de choc", les quatre cinéastes de Bande à part apportent chacun une réponse singulièrement différente. Ursula Meier traite d’un parricide ("Journal de ma tête"), Lionel Baier s’est lointainement inspiré du sadique de Romont ("Prénom Mathieu"), Jean-Stéphane Bron du drame de l’A1 ("La Vallée") et Frédéric Mermoud, donc, de l’Ordre du temple solaire.
L’affaire est complexe et des zones d’ombre demeurent. Cinq morts au Québec, en 1994. Puis quarante-huit morts en Suisse, à Salvan et à Cheiry. Seize morts dans le Vercors l’année suivante. Et cinq encore au Québec en 1997. Dans sa fiction, Frédéric Mermoud se concentre sur la Suisse. Il transpose le drame à Villars, dans les Alpes vaudoises, et resserre son récit autour des cinq jours qui ont précédé le drame.
Le gourou s’appelle Georges (Carlo Brandt). Avec sa douce et redoutable compagne, Claude (Dominique Reymond), il orchestre un funeste voyage vers l’étoile Sirius.
Se suicider pour renaître ailleurs, sur une étoile, dans l’espoir d’une vie meilleure, est une idée totalement vertigineuse. On est entre la croyance infrangible, le rêve enfantin et le délire.
Pour le cinéaste, cette affaire est devenue un espace de projection. "Au moment où tout a éclaté, on voyait ces images presque ridicules de capes rouges, de calices mêlées à des icônes égyptiennes. La secte donnait l’impression d’un grand gloubi-boulga esthétique. Je me suis dit qu’il fallait faire très attention à ne pas les ridiculiser, qu’il fallait montrer ce qui nous rapproche d’eux, pas ce qui nous en distancie. Ma question de départ était celle-ci : qu’est-ce qui fait qu’à un moment, on peut adhérer à un récit au point de perdre sa propre liberté? Qu’est-ce que cette secte raconte de nos peurs et nos doutes contemporains?"
Raphaële Bouchet/mcc
"Sirius", mercredi 14 mars à 20h15 sur RTS1.