Le film est tiré d'un roman de Nikos Kazantzakis intitulé "Alexis Zorba", publié en 1946, traduit en français dès 1947. Étonnamment, le roman ne paraît en Grèce qu'en 1954.
Kazantzakis y dépeint les habitants de la Crête sous des couleurs peu engageantes. Un village qui a ses propres lois, ses guerres internes et les envies de chacun.
On y assiste au pillage de la maison de la prostituée au moment de sa mort et à la lapidation d'une jeune veuve. C'est dur, violent.
Mais derrière la dénonciation de l'esprit villageois, Kazantzakis, auteur du "Christ recrucifié", propose une leçon de vie. Vivre n'est pas subir, mais au contraire, savoir aimer ou oublier, s'engager et, au-delà des péripéties de l'existence, rester fidèle à une morale, qui, même si elle n'est pas celle de tous, est la sienne.
L'écrivain est d'abord un poète épique, puissant, à l'humour magistral. Quand il met en scène son jeune intellectuel qui a tout lu, il met en scène quelqu'un qui n'a pas vécu. Il n'a pas lu le livre de la vie, celui que seule offre l'expérience. Celui que lui offrira Zorba.
Zorba le faune, la bourrasque, Zorba qui s'enthousiasme, Zorba le sage qui a tout compris sans jamais avoir appris, qui vit et ne réfléchit qu'après.
Le film se termine différemment du roman avec une danse sur la plage, tandis que dans le roman, le héros repart, avec dans sa tête et dans son cœur toute la matière d'un livre.
On a souvent dit que Zorba était le portrait craché de l'auteur du livre. C'est peut-être vrai. Car Kazantzakis avait pour lui un regard joyeux et doux, le rire haut et une force prodigieuse.
Le réalisateur Cacoyannis s'inspire de Kazantzakis pour son personnage de Zorba. Mais la veuve de l'écrivain n'est pas d'accord avec cette idée. Nikos Kazantzakis serait plutôt Basil, le jeune Anglais, engoncé dans son intellectualisme. Car l'auteur est torturé par la recherche de l'absolu, du verbe, du mot, de la pureté. Son roman célèbre ici la victoire de l'instinct sur l'intelligence.
Pour Michael Cacoyannis, c'est un roman amer, une tragédie grecque. Personne ne s'en sort. L'amour et l'innocence sont détruits. Mais le film entre dans l'histoire du cinéma comme un magnifique ode à la vie et non pas une tragédie.