"Le monde est complexe et très souvent insaisissable. Bien que nous nous soyons tournés vers la science, je pense que nous avons tous gardé au fond du cœur un certain attrait pour le magique", explique J.K.Rowling dans le documentaire "Harry Potter: aux origines de la magie" (voir ci-dessus). Se disant "fascinée", l'écrivaine à succès pense que la magie "nous connecte aux choses essentielles sur la nature de l'être humain, sur ce qu'il est, ce qu'il veut être et ce qu'il croit".
J.K.Rowling s'est inspirée de la superstition populaire, des mythologies et de l'alchimie pour mettre en forme l'univers d'Harry Potter.
"Le fait de recourir à des mythes préexistants ou à des créatures fantastiques a été un moyen de donner de la chaire à ce monde", estime l'auteure qui a vendu plus de 500 millions d'exemplaires.
Pour célébrer les vingt ans de Harry Potter, la Bibliothèque nationale du Royaume-Uni a voulu présenter les traditions sélectionnées par l'écrivaine pour alimenter sa saga. Et faire le point sur ce qui relève du réel et ce qui relève du fantasme.
Grimoires, balais, boules de cristal et autres artefacts de devins ou de sorcières ont ainsi été exposés entre octobre 2017 et février 2018. Une partie des pièces était issue des collections de J.K.Rowling. La plupart provenait du Musée de la sorcellerie et de la magie de Boscastle, le plus garni du genre. Voici la vérité sur quelques techniques bien célèbres:
Quelques secrets bien gardés
Acquérir l'immortalité:
l'alchimie figure au cœur de la magie de Poudlard. Cette pratique secrète, dont les traces les plus anciennes remontent au IIIe siècle, était très en vogue au Moyen-Âge. En transformant les métaux dans leur forme la plus pure, elle devait permettre de parvenir à la pierre philosophale. Le secret de cette substance, qui permet de prolonger la vie humaine, aurait été percé au XIVe siècle par un certain Nicolas Flamel. La tombe de ce bourgeois, située à Paris, semble toutefois prouver que l'expérience s'est soldée par un échec... Un siècle plus tard, le chanoine anglais George Ripley livrait sa recette. Elle figure dans le parchemin "Versets de l'élixir". Mais l'alchimiste serait lui aussi décédé…
Devenir invisible: la formule magique de l'invisibilité figure dans plusieurs ouvrages anciens, dont "The Key of Knowledge" (XVIIe siècle), mais il n'existe aucune preuve de son succès. En revanche, la cape d'invisibilité est sur le point d'exister véritablement. Composée de milliers de morceaux de fibres de verre de formes différentes, elle fonctionnerait en déviant les ondes électromagnétiques.
Voler avec un balai : le lien entre sorcellerie et balai remonte au XVe siècle. Olga Hunt, qui a existé au XXe siècle, était connue pour ses balades en balai dans le sud-ouest de l'Angleterre. Toutefois, aucune photographie n'a immortalisé ses prouesses.
Clamer des sortilèges:
de toutes les incantations qui permettent de modifier un objet ou un être vivant, "abracadabra" est la plus célèbre. Sa plus ancienne trace remonte au XIIIe siècle, sur un parchemin destiné à soigner la malaria. Il s'agit de supprimer la première lettre du mot successivement afin d'obtenir une amulette à porter au cou (voir photo). Selon J.K.Rowling, dont les héros utilisent la formule "Avada Kedavra" pour donner la mort, le terme proviendrait de l'araméen. "Adhadda kedhabhra" signifierait "que la chose soit détruite".
Concocter des potions magiques : le terme "potion" est d'origine latine et signifie "boisson". Cet art ancestral fait principalement appel à l'herboristerie. L'apothicaire de Poudlard se nomme Mullpepper, en référence à Nicholas Culpeper, un botaniste qui a démocratisé la médecine au XVIIe siècle, en rédigeant son herbier en anglais, et non en latin. Utilisées le plus souvent comme médicament ou comme poison, les potions pouvaient être vouées à un effet plus incertain, comme faire avouer la vérité ou rendre amoureux. Plus étrange encore, des morceaux d'animaux étaient jetés dans les potions afin d'en acquérir les caractéristiques. Par exemple, les restes de chat noir devaient permettre de se noircir, et donc de devenir invisible de nuit.
Les bézoards:
ces "pierres" présentes dans l'estomac de certains animaux, en particulier les chèvres, sont des amas de fibres non digérées. Signifiant "antidote" en persan, les bézoards étaient utilisés comme remède aux empoisonnements du Moyen-Age jusqu'au XVIIIe siècle.
Les racines tueuses de mandragore: au Moyen-Age, la mandragore était utilisée pour soigner divers maux, dont les céphalées et la démence. C'est en raison de leurs formes anthropomorphes que les racines avaient la réputation de pousser des cris lorsqu'elles étaient déterrées. Les feuilles de mandragore contiennent un poison hallucinogène, jamais utilisé à Poudlard.
Prédire l'avenir: plusieurs méthodes sont utilisées pour connaître le futur. Si la catoptromancie (avec un miroir) est d'usage dès l'Antiquité, la chiromancie (lignes de la main) serait venue d'Orient en Europe au XIIe siècle, la cristallomancie remonterait au Moyen-Age et la cartomancie daterait du XVIIIe siècle. Les pratiques chinoises millénaires (comme lire dans le thé ou les os) donnent un aperçu de la diversité des méthodes utilisées par l'être humain pour maîtriser son destin.
Et la baguette magique?
J.K.Rowling avoue avoir créé de toute pièce l'univers des baguettes magiques, faute d'informations sur le sujet. Pourtant, selon le documentaire, la famille Dusty Miller en fabrique depuis plusieurs générations. Un travail qui se fait de concert avec l'esprit des arbres, assurent ces artisans.
>> Le documentaire "Harry Potter: aux origines de la magie" a été diffusé le 25 février sur RTS2. Il est disponible dans RTSplay jusqu'au 4 mars.
>> A lire: "Harry Potter: à la découverte de l'histoire de la magie" (2018)
Caroline Briner