Au début des années 2000, des passionnés de musique ont commencé à fusionner des disques aux univers très différents pour proposer des combinaisons inhabituelles. Il est donc possible d'écouter Mickael Jackson sur du Nirvana, ou de découvrir Madonna accompagnée des Sex Pistols. Ces remix improbables sont des bootlegs. L'univers est fascinant et relativement méconnu.
DJ Zebra est l'un des précurseurs de ce phénomène musical. DJ rock mélomaniaque et exhibitionniste, ancien chanteur du groupe Billy Ze Kick, Antoine Zebra prend aujourd'hui la plume pour raconter le secret le mieux gardé de l'histoire de la pop music: celui des bootleggers, cette bande de pirates qui, grâce à des mixs improbables, a bouleversé les codes de l'industrie de la musique. L'ouvrage intitulé "Iggy Salvador" tient autant de l'autobiographie romancée que de l'analyse d'un phénomène musical.
Un livre-témoignage
La diffusion et le partage de ces bootlegs ont été facilités par l'explosion d'internet à l'époque. Certains remix se sont hissés en haut des charts. Antoine Zebra lui-même a mixé à Londres et Los Angeles sans jamais sortir de disque. Malgré le phénomène, aucun article n'a été publié dans la presse. Jamais aucun livre n'a traité du sujet. C'est pour pallier ce manque qu'Antoine Zebra a décidé d'écrire le livre "Iggy Salvador".
J'estime que c'est LE mouvement majeur des années 2000. C'est celui qui ressemble le plus au brassage qui a commencé à avoir lieu alors que tous les styles musicaux avaient déjà été explorés. Tout le monde s'est mis à tout mélanger.
"Je suis un paradoxiste"
Un livre écrit par l'un des précurseurs du mouvement musical? Un paradoxe qu'assume pleinement Antoine Zebra. "Je voulais le faire avec un journaliste, Christophe Crénel, à la base. "Lui, devait s'occuper de la partie vraiment didactique, et moi de la partie romancée", explique l'auteur. Même si Antoine Zebra se base sur une histoire vraie, de réelles anecdotes et des extraits d'interviews, le lecteur découvre à travers le personnage d'Iggy Salvador, un héros au destin fantasmé.
Quand on est arrivé dans les années 2000 avec ça, les gens n'avaient jamais entendu de tels mélanges. Les puristes criaient au scandale. On n’avait pas le droit de faire ça.
Aujourd'hui, le phénomène du bootleg s'est essoufflé. Parce que "ce n'est plus possible d'être aussi subversif", explique Antoine Zebra. Certains considéraient en effet les musiciens faisant du bootleg comme de véritables pirates.
Pour Antoine Zebra, la recette d'un bon bootleg, c'est un mélange auquel on ne croit pas du tout sur le papier, un mélange qui semble impossible. Le résultat peut être étrange, absurde, subliminal. "Il y a aussi des bootlegs qui donnent l'impression que le titre a toujours existé ainsi, et ça, c'est bien aussi".
Lara Donnet
Propos recueillis par Michel Masserey et Pierre Philippe Cadert.
"Iggy Salvador", aux Editions le Texte Vivant. Dédicace le 25 avril à la FNAC de Genève. DJ Zebra sera en concert le 3 mai au SAS à Delémont et le 16 juin à FestiNeuch.