Il y a 60 ans, Albert Camus meurt, un 4 janvier, à l'aube de la nouvelle année 1960. L'écrivain français, symbole de la résistance et de la pensée libre, auréolé du prix Nobel de littérature deux ans auparavant, se trouve avec Michel Gallimard au moment de sa mort. Le neveu de l'éditeur Antoine Gallimard conduit sa Facel Vega lorsque celle-ci s’enfonce dans un platane sur la route du retour vers Paris.
Albert Camus meurt sur le coup, laissant le monde orphelin. "La mort de Camus n'a pas seulement été la disparition d'un homme, mais aussi celle d'un possible qu'il représentait: l'existence du fait moral dans un monde dépouillé de sens", écrit Vincent Duclert dans l'excellent ouvrage qu'il consacre à l'auteur de "La Peste", de "L'Etranger" et de "L'Homme Révolté", intitulé "Camus, des pays de liberté", paru aux éditions Stock.
Un travail minutieux
Historien, professeur à Sciences Po à Paris et directeur de recherche à l'Ecole française des Hautes études en sciences sociales, Vincent Duclert réussit le tour de force de mêler la vie et l'œuvre d'Albert Camus, sans jamais céder à la facilité et en relisant minutieusement les archives de l'écrivain, ses carnets intimes, ses articles de journaux et sa correspondance.
Fait remarquable: Vincent Duclert publie en annexe à son ouvrage un texte inédit signé de la main d'Albert Camus. Trois feuillets dactylographiés datant de 1943, intitulés "D'un intellectuel résistant". Un bref essai qui est un appel poignant au renouvellement des élites, et que Vincent Duclert a retrouvé dans les archives du Général de Gaulle. En pleine Deuxième Guerre mondiale, Albert Camus y souligne l'importance de l'engagement et révèle les incertitudes qui le taraudent.
Un ouvrage essentiel pour comprendre Camus
Car Camus était une figure complexe, aussi colossale que pleine de failles. Il était à la fois un artiste engagé, un homme libre, un résistant, un grand amoureux, un citoyen téméraire qui avait fait de sa vie un combat. Mais il portait aussi en lui son exil, le soleil de son Algérie natale, sa terre déchirée et le mépris du milieu littéraire germanopratin qui persistera, tout au long de sa vie, à lui rappeler sa condition de transfuge social et de pied-noir.
Et c'est tout cela que dévoile Vincent Duclert dans son ouvrage solaire, minutieusement élaboré et si plein de l'admiration (pudique) que l'historien porte au prix Nobel de 1957. Un ouvrage essentiel pour mieux comprendre toutes les facettes d'Albert Camus.
Vincent Duclert avertit le lecteur dès les premières pages de son livre: les pièges de la postérité d'Albert Camus sont nombreux: "la perte de sens, la banalité, une forme d'effacement..." Lisons donc, pour ne pas y céder.
Linn Levy/aq
Vincent Duclert, "Camus, des pays de liberté", Ed. Stock
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