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Frédéric Pajak met un point final à son livre sans fin

Frédéric Pajak. [DPA / dpa Picture-Alliance/ AFP - Uwe Zucchi]
Entretien avec Frédéric Pajak, auteur du "Manifeste incertain n°9" / QWERTZ / 31 min. / le 8 septembre 2020
Frédéric Pajak livre son neuvième et dernier Manifeste incertain. "Mon livre se referme enfin", écrit-il simplement en concluant une aventure éditoriale qu’il présente lui-même comme un livre sans fin. "Avec Pessoa" figure sur la première liste du Prix Renaudot Essais.

Avec "Le manifeste incertain, 9: Avec Pessoa. L'Horizon des événements. Souvenirs. Fin du Manifeste" s’achève une quête minutieuse et exigeante, - plus ou moins 3000 pages et 2000 dessins -, "dix ans de rêveries ou de fermentation", où l’écrivain et dessinateur franco-suisse a voulu "ébaucher une sorte de paysage d’un sentiment familier et secret: l’incertitude".

Un jeu de pistes

Le tout dégage la fluidité d’une aquarelle où tout se mêle. Le présent, ses gilets jaunes et le Coronavirus, et le passé. L’intimité de Pajak, ses émotions personnelles et son compagnonnage avec des figures intellectuelles et artistiques comme Walter Benjamin, Ezra Pound, Emily Dickinson, Vincent Van Gogh ou encore Fernando Pessoa, dans ce dernier tome. Autobiographie et biographies. Formes et formats différents.

Le Manifeste, "je le considère comme un jeu, un jeu de piste ou un labyrinthe", explique Frédéric Pajak à la RTS. On peut aussi y voir un jeu de miroirs, où les mots affrontent les dessins et où les dessins complètent les mots, comme par capillarité.

Frédéric Pajak s’est laissé voguer. Il aime préciser que les figures intellectuelles qui traversent son Manifeste se sont imposées. Il constate qu’elles sont souvent venues du 19e siècle, - un siècle qu’il ne se lasse pas d’explorer -, et que ce sont souvent des "ratés magnifiques", méconnus ou incompris de leur vivant et "vengés par la postérité". Scruter, digérer le passé pour mieux dire l’ici et maintenant.

Pessoa, le plus grand poète du Portugal

Des pages de ce neuvième volume surgit Fernando Pessoa, l’homme qui résumait sa vie à deux dates. "Le plus grand poète du Portugal .... un des plus grands poètes de son siècle", précise Frédéric Pajak.

Pessoa est né le 3 juin 1888. Après la mort de son père, à huit ans, il suit sa mère et son beau-père en Afrique du Sud. A 17 ans, il revient s’installer à Lisbonne, où il mène une vie de fonctionnaire. Rentré chez lui, il écrit et donne vie à près de 80 hétéronymes, ses avatars d’écriture.

Fernando Pessoa établit son propre horoscope et prédit sa mort en 1937. En 1935, il devient anti-salazariste, anticlérical, il sombre dans la dépression et vit isolé. Le 30 novembre de la même année, il meurt à l’âge de 47 ans.

Dans sa malle à documents, on découvrira quelque 30’000 documents, presque tous inédits. Parmi tous ces feuillets il y a son œuvre, "Le Livre de l’intranquillité", son livre sans fin.

"Si lorsque je serai mort, on veut écrire ma biographie,

il n’y a rien de plus simple.

 Elle n’a que deux dates – celle de ma naissance et celle de ma mort

 entre l’une et l’autre tous les jours sont à moi »

Fernando Pessoa

Frédéric Pajak partage quelques souvenirs de voyage, de jeunesse, quand il avait 17 ans, et qu’il "caressait" déjà l’incertitude. Il évoque des animaux, des anonymes croisés au détour d’une ruelle. Il rend hommage à des êtres chers disparus et il offre les dernières lignes à un certain Jésus, le fils de Dieu condamné à courir la planète depuis 2000 ans. Quant à Fernando Pessoa, il se déploie tranquillement "dans le vide immense de ce monde".

Marlène Métrailler/aq

Frédéric Pajak, "Manifeste incertain 9", Ed. Noir sur Blanc.

A l’occasion de la parution du "Manifeste incertain 9", la galerie LIGNEtreize de Carouge expose tout un corpus de dessins tirés des neuf volumes du "Manifeste incertain". A voir jusqu’au 19 septembre.

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