Fonctionnaire européen spécialiste de la prospective, Jean Detrez a fait de l’avenir une science, qu’il étudie avec rigueur. Pourtant, il lui semble soudain que tout lui échappe: son père meurt et sa femme le quitte. Cette imprévisibilité, il en fait également l’expérience dans sa vie professionnelle, car cet humaniste n’avait imaginé ni le Brexit ni l’élection de Trump.
Même si on sait l’un et l’autre que quelque chose de tendre est susceptible de survenir à tout instant, il y a un dernier cap à franchir, qui peut sembler minuscule, et dont on peut même se rendre compte, à posteriori, en se retournant pour revoir la scène dans son souvenir, que ce n’était en réalité qu’un tout petit gué tellement aisé à traverser, mais qui, tant qu’il n’est pas franchi, tant qu’on ne l’a pas passé, demeure un obstacle insurmontable.
Un merveilleux écrivain de l'intime
Des émotions privées aux émotions collectives, c’est une facette méconnue du grand écrivain belge qui se dévoile. Car "Les émotions" est un texte politique qui dit beaucoup sur notre époque. Pour autant, Jean-Philippe Toussaint reste dans ce livre un merveilleux écrivain de l’intime.
C’est un désir, un projet, d’explorer de petites choses. Des émotions intimes, personnelles, fugaces, passagères, volatiles, que j’essaie de capturer, de saisir.
Après "La clé USB", roman à suspens qui nous conduisait jusqu’en Chine sur la trace de mystérieux lobbyistes, l’auteur de "La salle de bains" retrouve le même narrateur dans un texte d’une extrême finesse où il explore les mille facettes du sentiment amoureux, et surtout le rapport au temps, celui qui passe et après lequel on court.
Sylvie Tanette/aq
Jean-Philippe Toussaint, "Les émotions", Ed. de Minuit.
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