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Florence Cestac, la bande dessinée comme terrain de combat féministe

L'auteure de bande dessinée Florence Cestac le 22 janvier 2021 à Paris. [AFP - Joel Saget]
Florence Cestac rebelle à vie / Vertigo / 5 min. / le 16 février 2021
A 71 ans, Florence Cestac livre "Un papa, une maman – une famille formidable (la mienne)", l'album le plus autobiographique de sa carrière. Elle y balance ses traumatismes d'enfant, son père et les méthodes éducatives de la bourgeoisie d'alors. Jubilatoire!

Dans la famille Cestac il y a Papa Jacques, Maman Camille, Mi grande sœur, Flo et Phi petit frère. On est en Normandie, décor d'une bande dessinée aux accents autobiographiques, "Un papa, une maman – une famille formidable (la mienne)".

Flo naît à la fin des années 1940 à Pont-Audemer et grandit à Rouen. Dans une "famille formidable", où le père règne en maître omnipotent, dans un milieu très catholique et bienpensant. Peu pour elle, sa vie durant, Florence Cestac mettra tout en œuvre pour surmonter cette "misère affective".

Je m'aperçois que je n'étais pas la seule à subir ce genre de père, qui prenait toute la place dans la maison, qui commandait (…) et où tout était programmé pour que moi aussi je fasse la même famille, que je me trouve un mari, que je m'achète la maison à crédit... Et moi, j'étais le vilain petit lapin de la famille et j'ai fait tout à l'envers...

Extrait de l'entretien avec Florence Cestac

Rebelle à vie

Toute petite, Florence dessine, elle lit en cachette les bandes dessinées de son frère, une lecture indigne d'une jeune fille comme il faut. Très vite, elle fait tout pour échapper au carcan familial, quitte à subir la loi des bonnes sœurs du "Pensionnat des Oiseaux" d'Honfleur. Un passage qui lui inspirera "Les filles des Oiseaux", une série de deux albums publiés chez Dargaud en 2016 et 2018.

Dans la famille Cestac, une fille n'a qu'une voie devant elle: faire un bon mariage et devenir parfaite comme maman. Florence réussira pourtant à se défiler, à entrer aux Beaux-Arts de Rouen – contre la volonté du père – puis à larguer définitivement les amarres.

Juste avant Mai 68. La voilà sur les barricades. Avec ses amis, elle fera même 18 jours de prison. Sera condamnée à une lourde amende, – que papa paiera de mauvaise grâce –, et se retrouve privée de droits civiques pour cinq ans. Rien ne l'arrêtera.

>> A écouter, un entretien avec Florence Cestac :

Florence Cestac. [AFP - Joël Saget]AFP - Joël Saget
Entretien avec Florence Cestac, autrice de "Un papa, une maman, une famille formidable (la mienne)" / QWERTZ / 5 min. / le 22 février 2021

En 1972, avec son compagnon, un hippie – que son père méprise –, ils achètent la librairie Futuropolis. Deux ans plus tard, ils fondent les éditions du même nom, c'est le début d'une longue aventure éditoriale à succès.

A partir de là, tout réussit à Florence Cestac. Ses collaborations aux magazines avant-gardistes de l'époque: Métal Hurlant, L'Echo des Savanes, Charlie, Pilote, (A suivre) et tant d'autres… Parallèlement, Futuropolis lance des auteurs comme Moebius ou Jacques Tardi, et elle imagine Harry Mickson, un mix de Mickey Mouse et Harry Dickson de Jean Ray. Avec son gros nez, il devient aussitôt la mascotte de Futuropolis. Plus tard, le père de son enfant la quitte, elle ne désarme pas et continue d'aligner les albums plus ou moins autobiographiques, dont "Le démon de Midi", directement inspiré de l'échec de son couple qui lui vaudra, en 1997, son deuxième Alph-Art humour.

Ceci à Angoulême, le festival dont Florence Cestac n'a jamais manqué une édition depuis sa création en 1974. Angoulême qui lui décerne son Grand Prix pour l’ensemble de sa carrière en 2000. Elle est alors la deuxième femme à le recevoir après Claire Bretécher, sa complice et amie.

Une autrice engagée

En 2001, Florence Cestac préside le festival d'Angoulême et, pour la première fois, elle constitue un jury largement constitué de femmes. La présidente est aussi la première à proposer de rédiger des statuts pour défendre la profession des autrices et auteurs de bande dessinée. Comme tout au long de sa vie, elle ne perdra jamais l'occasion de s'engager pour la cause des femmes et pour dénoncer la précarité qui règne toujours au sein de la branche.

Marlène Métrailler/ld

Florence Cestac, "Un papa, une maman – une famille formidable (la mienne)", aux éditions Dargaud.

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