Deux ans après la publication de son livre "376 jours de prison pour rien", qui raconte comment les parents de deux fillettes ont été emprisonnés à tort à la suite d’une erreur judiciaire des autorités genevoises, la journaliste et écrivaine franco-suisse Marion Emonot revient avec "Ressuscité". Un récit romancé poignant et choquant sur le drame d’une famille de migrants afghans.
Déterminé à sauver ses enfants des mariages forcés et des trafiquants d’organes, un couple décide en 2015 de fuir l'Afghanistan. Les parents perdent leur fils de neuf ans aux portes de l'Europe, alors qu'ils embarquent pour Lesbos sur un rafiot de fortune. Un an et demi plus tard, la famille le retrouve grâce aux recherches acharnées d’un membre de la Croix-Rouge. Heureusement, le petit Mahdi a été retrouvé en Suisse allemande. Il est en effet monté dans un bateau avant le reste de sa famille et a suivi une autre famille afghane. Ses proches n'étaient pas loin, en Allemagne. Un "happy end" qui lève aussi le voile sur la réalité trop souvent ignorée des migrants.
Un amour maternel universel
C’est en regardant la BBC que Marion Emonot prend connaissance du drame. "Cela m’a bouleversée parce que j’ai vu qu'une mère avait passé entre 16 et 19 mois sans savoir ce qu'était devenu son fils […] elle n’avait ni corps pour faire le deuil, ni la profonde conviction que Mahdi, son fils, s’était noyé."
Je ne suis pas sûre qu'il y ait pire douleur que celle de ne plus avoir son enfant, de ne pas savoir ce qu'il est devenu.
Pour rédiger son livre, la journaliste et auteure a décidé de raconter cette histoire à travers la perspective de la mère. Pour cela, Marion Emonot s'est rendue chez la famille, en Allemagne, pour que cette Afghane lui raconte tout: son enfance, son mariage forcé, la disparition de son fils et sa demande d'asile. Un choix délibéré. "J’ai aussi vécu des épreuves personnelles, on a failli m’arracher mes enfants. Je pense qu'il est intéressant, peut-être même purgatoire, de se mettre dans la peau de cette mère de famille", explique Marion Emonot. La rencontre entre les deux femmes s’est bien passée: "c’est une famille très accueillante, ces rencontres étaient poignantes. J’étais accompagnée par un interprète, un Vaudois amoureux de l’Afghanistan."
Après les retrouvailles, une nouvelle vie
La journaliste garde contact avec la famille dont les demandes d’asile en Allemagne ont été acceptées. "Tout va bien maintenant. Les filles aînées ont 18 et 20 ans. Elles font de grandes études, comme elles le voulaient. L’une se destine à être pédiatre et l’autre juge pour enfants. Les garçons de la famille rêvent d’être footballeurs professionnels. Ils s’accrochent à l’école, mais ils sont victimes d’injustices, j'en touche un mot dans le livre", détaille Marion Emonot.
Propos recueillis par Julie Evard
Adaptation web: Myriam Semaani
Marion Emonot, "Ressuscité", éditions Slatkine.