Premier roman. [Depositphotos]
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La genèse de mon premier roman

>> D'où vient l'idée d'un premier roman? Une fois publié, que change-t-il au quotidien de son autrice ou auteur? Quelle pourrait être la bande-son de ce premier ouvrage?

>> Pendant deux semaines, "Vertigo" s'est intéressé aux autrices et auteurs d'un premier livre récemment publié. 50% de femmes, 40% de Suisses, 20% d'éditeurs helvétiques et 10% d'auteur.e.s suisses publiés en France. Ils sont dix en tout.

>> Attention spoiler: on apprend notamment dans cette série que les premiers romans édités ne sortent pas du néant. Ils sont souvent le fruit de nombreux autres manuscrits, retravaillés et façonnés encore et encore.

Propos recueillis par Pierre Philippe Cadert et Anne-Laure Gannac

Réalisation web: mh/sb

Gabriela Trujillo

"Lʹinvention de Louvette", publié aux éditions Gallimard

L. doit se faire opérer d’une lésion oculaire. D’où vient cette blessure? Une trop grande exposition au soleil? Les interrogations banales du médecin ouvrent la porte aux souvenirs enfouis. Aux 17 premières années de Louvette, née dans un tout petit pays d’Amérique centrale toujours en guerre et plein de volcans qu’on devine être le Salvador.

Un extrait du livre: On dit souvent de Louvette qu’elle est une étrange petite fille. Elle a ça de drôle – une vocation pour la turbulence et les joies faciles – qui fait craindre qu’elle ne soit atteinte d’un degré rare d’idiotie. Pourtant, il n’y a rien de bizarre chez elle, sauf qu’il lui arrive parfois des choses. Le jour de sa naissance, par exemple. C’est un jour à beau fixe, comme le sont tous les matins de décembre au bord du Pacifique, et un séisme de 7.3 de magnitude fait chavirer pendant vingt-cinq secondes l’étroit liseré de l’Amérique centrale. Un si long tremblement de terre pourrait faire tache dans tant d’azur, et ne sert pourtant qu’à rendre le ciel encore plus bleu. L’épicentre se situe au large de l’océan cobalt. Les quatre-vingt-dix répliques qui se prolongent pendant sept jours vont de 2 à 4.5 sur l’échelle de Richter. À quelques kilomètres de la côte, on déplore des dommages collatéraux et des naissances intempestives, dont celle de Louvette. Souvent, on associe son tempérament agité au séisme qui l’a fait naître.

Entre la menace des fusillades dehors et les débordements violents dans la famille, Louvette grandit en enfant sauvage que seule la découverte de la langue française, du pouvoir des mots, peut assagir. C’est le cœur du premier roman de Gabriela Trudjillo.

>> A écouter, l'entretien avec Gabriela Trujillo :

La couverture du roman de Gabriela Trujillo, "L'invention de louvette". [Ed. Gallimard]Ed. Gallimard
Premier roman 10/10 / Vertigo / 8 min. / le 29 octobre 2021

Clara Ysé

"Mise à feu", publié aux éditions Grasset

L’an 2000 est sur le point de surgir. Dans la maison, les adultes boivent, dansent, festoient comme il se doit autour de l’Amazone: c’est ainsi que l’appellent ses deux enfants Gaspard et Nine qui regardent cette femme puissante et libre. Il y a aussi Natchka avec eux, une pie qui parle. Mais à peine le passage au nouveau millénaire acclamé, un incendie se déclare dans la maison. Panique, fuite en pleine nuit. L’Amazone en profitera pour disparaître, laissant les enfants à leur oncle détestable.

Un extrait du livre: Les flammes jailliraient par les fenêtres, immenses, terrifiantes de beauté et de sauvagerie. Depuis les hauteurs, les oiseaux observeraient la maison, feu d’artifice à l’horizontale, et traceraient un chemin code dans la fumée pour ne pas se bruler. Les hommes étaient fous. Le foyer palpitant apparaitrait aux yeux d’un petit garçon qui regarderait par le hublot d’un avion, peu de temps après son décollage pour l’Italie – foyer qu’il dessinerait sur la page blanche posée sur la tablette que sa mère aurait tout juste ouverte. Plus tard, adolescent a la démarche de cheval farouche portant le nom du soleil, il repenserait souvent à cette grenade ouverte comme un cœur dans la ville.

C’est puissant, troublant, traversé de magie comme un conte, percé de douleurs comme un cauchemar, mais aussi de force et d’émotions vibrantes. Et c’est le thème du premier roman de la chanteuse et musicienne Clara Ysé.

>> A écouter, l'entretien avec Clara Ysé :

La couverture du roman de Clara Ysé, "Mise à Feu". [Ed. Grasset]Ed. Grasset
Premier roman 9/10 / Vertigo / 10 min. / le 28 octobre 2021

Benoît Coquil

"Buenos Aires nʹexiste pas", publié aux éditions Flammarion

Septembre 1918: Marcel Duchamp, artiste ultra connu dans l’Amérique de l’époque, s'embarque sur le "Crofton Hall" de New York direction Buenos Aires. Il y passera neuf mois. Neuf mois dont on ne sait à peu près rien, comme une disparition de l’artiste.

Un extrait du livre: Il est celui par qui le scandale est arrivé, d’abord nu et dans l’escalier, puis dans un urinoir retourné. Il est l’éléphant dans le jeu de quilles des Salons, l’Ulysse aux mille ruses de l’art moderne. D’après son ami Henri-Pierre Roche, il est le français le plus connu de l’époque à New York avec Sarah Bernhardt et Napoléon. Mais pour l’heure, c’est juste un mince jeune homme au complet froissé qui sent le tabac froid. Nous sommes le 9 septembre 1918 et Marcel Duchamp descend du "Crofton Hall" après vingt-cinq jours de traversée.

Ce récit littéraire raconte un "blanc" biographique où la fiction est appelée à la rescousse là où manquent les documents. Jusqu’à imaginer les rendez-vous manqués de Duchamp avec quelques-unes des plus grandes figures argentines, dont Jorge Luis Borges.

>> A écouter, l'entretien avec Benoît Coquil :

La couverture du roman de Benoît Coquil, "Buenos Aires n'existe pas". [Ed. Flammarion]Ed. Flammarion
Premier roman 8/10 / Vertigo / 5 min. / le 27 octobre 2021

Rebecca Gisler

"Dʹoncle", publié aux éditions Verdier

Il a le ventre lourd, la démarche boiteuse... Ce qu’il mange, où il vit, ce qu’il aime faire et ce qu’il regarde par la fenêtre: la narratrice nous le décrit comme s’il s’agissait d’une grosse bête à la fois étrange et banale qu’elle côtoie depuis longtemps. Cet homme c’est son oncle, avec lequel elle vit, ainsi que son frère qu’elle décrit aussi au passage. Et sa mère suissesse qui vient à l’occasion et sans plaisir. Il faut dire que l’hygiène n’est pas le fort de l’oncle…

Un extrait du livre: Une nuit je me suis réveillée avec la certitude que l’oncle s’était enfui par le trou des toilettes, et alors, poussant la porte des cabinets, j’ai constaté que l’oncle, en effet, s’était échappé par le trou des toilettes, et sur le carrelage il y avait un tas de confettis de papier hygiénique et des plumes blanches par centaines, comme si quelqu’un y avait fait une bataille de polochons, et la cuvette des toilettes ainsi que les murs étaient badigeonnés de poils et de toutes sortes de fientes, et regardant par le trou de faïence, je me suis dit que ça n’avait pas dû être facile pour l’oncle, et je me suis demandé ce que j’allais pouvoir faire pour le sortir de là, sachant que l’oncle doit peser un bon quintal, et j’ai tout d’abord pris la brosse à toilettes et je l’ai enfoncée le plus loin possible dans le trou au fond duquel stagnait une eau brunâtre, et j’ai remué la brosse mais ça ne servait à rien, peut-être l’oncle avait-il déjà atteint la fosse septique, et remuant ainsi, l’eau marécageuse débordait sur le sol, charriant dans son flot de répugnantes matières, et je glissais et mes genoux s’enfonçaient dans ce conglomérat, et je me serais presque crue dans la baie, juste après que la mer s’est retirée, quand tout est bien vaseux et nauséabond.

Avec ce premier roman, Rebecca Gisler propose une écriture entomologiste, intriguée et amusée, qui vise à faire le tour d’un sujet aussi étrange que fascinant: un oncle.

>> A écouter, l'entretien avec Rebecca Gisler :

La couverture du livre "D'Oncle" de Rebecca Gisler. [Editions Verdier]Editions Verdier
Premier roman 7/10 / Vertigo / 9 min. / le 26 octobre 2021

>> A lire aussi : "D'oncle" de Rebecca Gisler, sous la peau d’un animal romanesque

Pierre Darkanian

"Le Rapport chinois", publié aux éditions Anne Carrière

Qu’est-ce qu’un bullshit job? Tugdual Laugier ne le sait pas encore quand il franchit le seuil d’un cabinet de recrutement, mais il s’apprête à en faire l’expérience. Embauché dans un grand cabinet de conseil international, il n’a rien d’autre à faire que des ronds avec sa cravate et se réjouir du gros salaire qu’il perçoit chaque mois. Jusqu’au jour où, trois ans plus tard, une étude lui est enfin confiée par un certain Relot qui doit bouleverser la collaboration commerciale entre la France et la Chine sur fond…. de mini-croissants.

Un extrait du livre: Pour intégrer le cabinet Michard & Associés, Tugdual Laugier avait dû passer deux tests de recrutement que le chasseur de têtes avait respectivement intitulés "test productif" et "test d’aptitudes". Le premier consistait à rédiger en une semaine un mémoire d’une trentaine de pages, sur le thème du "rouleau". Il s’agissait d’un exercice classique conçu par les recruteurs afin de jauger le comportement du candidat dans une situation de stress. Sans aucune information complémentaire, mais sans se laisser déconcerter, Tugdual avait planché sur le rouleau à pâtisserie, le rouleau de scotch, le rouleau compresseur, les rouleaux du Pacifique, les rouleaux de printemps, le rouleau de peinture, le rouleau à gazon, et il parvint même à trouver une problématique commune à tous ces rouleaux, à savoir la question du déroulé, et surtout à se passionner pour son travail. Fier de son ouvrage, Tugdual remit, dans les délais impartis, un mémoire de cent cinquante feuillets entre les mains du chasseur de têtes qui l’adressa à son tour aux recruteurs de Michard & Associés, non sans avoir pris soin de le féliciter pour son "très beau boulot" bien qu’il ne l’eût pas lu. Tugdual n’en entendit plus jamais parler.

Quand la société des Hommes devient une farce, la vérité a besoin d’un bouffon. Premier roman de Pierre Darkanian, "Le Rapport chinois" offre un voyage en absurdie qui révèle avec humour les dérives du monde du travail sous le règne du cynisme.

>> A écouter, l'entretien avec Pierre Darkanian :

La pochette du livre de Pierre Darkanian, "Le rapport chinois". [Ed. Anne Carrière]Ed. Anne Carrière
Premier roman 6/10 / Vertigo / 9 min. / le 25 octobre 2021

Ann-Kathrin Graf

"La mort du hibou", éditions "Plaisir de Lire"

Le hibou, c'est la mère de Sarah, la narratrice. Tout est dû à cette grande bourgeoise, femme ensorcelante et sophistiquée. Elégante, pleine de bon goût mais cassante aussi, la voici frappée par la vieillesse. Petit à petit, elle se transforme, alors que la grossesse de la narratrice avance.

Un extrait du livre: "Je suis sortie dans l’air froid de février et j’ai avancé en direction de l’hôpital en fendant l’air lentement comme si c’était de l’eau. Les matières s’étaient transformées. Le béton du trottoir, une sorte de caoutchouc boueux qui ralentissait ma progression. Je me suis dit que je ne marchais pas, que je ramais. Ce n’était pas désagréable, mais c’était curieux. J’ai gardé cette sensation encore longtemps, des mois. Comme si ma marche était simultanément immobile, agréable et fastidieuse, le tout au ralenti. Comme dans un rêve dit-on. C’était peut-être ça, comme dans un rêve."

L'idée de ce premier roman est venue à Ann-Kathrin Graf en raison d'un épisode de vie vécu fréquemment dans son cercle familial et amical. "C'est notre lot d'êtres humains d'être confrontés aux problèmes de santé de proches. Et à chaque fois, on est démunis. On tombe des nues comme si on nous avait promis que jamais nos proches n'auraient de soucis de santé et qu'ils resteraient avec nous toute notre vie. Ce n'est évidemment pas le cas et ce livre est pour moi une réflexion ou un accompagnement face à ces moments qui peuvent aussi être un 'concentré de vie'".

>> A écouter, l'entretien avec Ann-Kathrin Graf :

La couverture du livre "La mort du hibou" d'Ann Kathrin Graf. [Plaisir de Lire]Plaisir de Lire
Premier roman 1/10 / Vertigo / 9 min. / le 18 octobre 2021

>> A lire aussi : "La mort du hibou", premier roman de la Genevoise Ann-Kathrin Graf

Alain Mascaro

"Avant que le monde ne se ferme", éditions Autrement

Anton Torvath est tzigane et dresseur de chevaux. Il est né au coeur de la steppe kirghize peu après la Première Guerre mondiale et grandit au sein d'un cirque, entouré d'un clan de jongleurs, de trapézistes et de dompteurs de lions faméliques. C'est un "fils du vent" qui va buter sur la Deuxième Guerre mondiale, à la fois témoin et victime du génocide. Au cirque, dans les ghettos, dans les camps, avec les juifs, les tziganes et les prisonniers soviétiques, face aux SS, il va devenir, plus tard, la mémoire d'un peuple sans mémoire.

Un extrait du livre: "Oui, Anton eut le temps de s’imprégner de la beauté. Il la recueillait en lui au fil des chemins, il s’en nourrissait, il l’espérait sans cesse et sans cesse elle venait. Pourtant il savait qu’un jour elle lui serait retirée. Johann l’avait dit, son père le disait, Jag et les livres aussi. C’était dit, c’était écrit. L’histoire des hommes était ainsi faite qu’on ne pouvait faire un pas sans s’embourber dans un charnier. Il y aurait bientôt la guerre; Anton l’avait lu dans les journaux, mais c’était surtout inscrit dans le cheminement même de l’humanité."

Le titre de ce premier roman ne doit rien au hasard. "J'ai vraiment l'impression aujourd'hui que le monde se ferme; tout est clôturé et je le déplore. J'avais envie d'écrire quelque chose sur une liberté inaliénable, qui ne veut pas se rendre, comme mon personnage Anton", explique Alain Mascaro.

>> A écouter, l'entretien avec Alain Mascaro :

La pochette du livre d'Alain Mascaro, "Avant que le monde ne se ferme". [Editions Autrement]Editions Autrement
Premier roman 2/10 / Vertigo / 10 min. / le 19 octobre 2021

Nadia Boehlen

"Souvenirs en similicuir" publié chez Slatkine

Ce livre débute au Tessin dans une vallée reculée. De cette vallée va partir une femme, la mère de la narratrice. Une vie chahutée, bousculée entre les cantons et les langues, marquée par un premier mari violent, un divorce, puis une nouvelle rencontre. Et le constat de sa fille que dans cette famille, ni riche, ni pauvre, on n'a pas les codes, on ne discute ni politique, ni culture. Pourtant suite aux conseils d'un professeur, cette jeune fille va intégrer un lycée réputé et se confronter, de nouveau et plus durement, à sa condition sociale.

Un extrait du livre: "Ma mère a placé quelques tomes des collections 'Bibliothèque rose' et 'Bibliothèque verte' sur l’étagère de ma chambre. Plus tard, elle se met en tête de décorer le nouveau buffet du salon avec des livres. Elle acquiert une série d’ouvrages animaliers avec des points Mondo et Silva et commande les classiques de la littérature russe, une édition reliée en similicuir rouge, plus prestigieux que des poches, selon elle. Chaque fois que j’essaie de prendre un de ces ouvrages, elle me le reproche. Il ne faut pas qu’ils s’abîment."

Pour cet ouvrage, Nadia Boehlen s'est inspirée de son propre bagage autobiographique. "J'avais cela à l'intérieur de moi, il fallait que je le traite pour passer ensuite à autre chose. Ce livre est vraiment inspiré de mon vécu personnel", dit celle qui est également porte-parole d'Amnesty International pour la Suisse. Avec en son centre une famille de classe moyenne vivant en Suisse dans une zone périphérique, le livre fait écho au vécu de beaucoup de ses lectrices et lecteurs, révèle l'autrice.

>> A écouter, l'entretien avec Nadia Boehlen :

La couverture du livre de Nadia Boehlen, "Souvenirs en similicuir" [Ed. Slatkine]Ed. Slatkine
Premier roman 3/10 / Vertigo / 10 min. / le 20 octobre 2021

Nicolas Derron

"Les amitiés sauvages" publié chez Torticolis et Frères

Il y a Seb, Nico, Thérèse, Soph, Marc, Sylvain, Florian, Mathieu, Véro, Frnk. Il y est question de musique, de groupes que l'on connaît bien (The Cure, Nada Surf, Green Day, ...), de Kurt Cobain, de sortir de l'adolescence, de devenir adulte, d'avoir des enfants ou pas, de changer de vie, les amours se font et se défont. "Les amitiés sauvages" est un roman générationnel.

Un extrait du livre: Je crois que c’est Soph et Sylvain qui ont donné naissance à nos week-ends de camping. On est une dizaine, guère plus cette année-là, à partir en train, en voiture et à vélo (Florian, Matthieu et moi), on arrive dispersés, ce qui fait le bonheur du bar dépeuplé du camping qui devient notre lieu de rassemblement et dont nous épuiserons un fût de bière, on monte les tentes, au crépuscule, ivres de bonheur et d’alcool, éclairés par un feu où grillent saucisses de veau et tranches de porc, une légère pluie que personne n’avait invitée nous motive à poser quelques sardines en plus et à amorcer l’idée de faire des rigoles pour ne pas être inondés, travail vite abandonné lorsque Frnk sort sa guitare et Sylvain sa bouteille de vodka, on fume, on boit, on chante mal '51St State of America' et 'Green and Grey' et on s’endort tard, mais tellement bien dans nos tentes ou, pour les plus vaillants, sous le ciel devenu étoilé, les pieds dans le feu crevotant.

Le livre s'inspire là-encore du vécu de son auteur, Nicolas Derron, qui souhaitait raconter ses années d'ado dans les années 1990 et l'amitié d'une bande de potes. Le roman est aussi un hommage au rock, la musique y est très présente. "Ces amitiés sont belles et justement assez rock n' roll. Apposer 'sauvage' à 'amitié' reflétait quelque chose de beau et de turbulent à la fois".

>> A écouter, l'entretien avec Nicolas Derron :

La pochette du livre de Nicolas Derron, "Les amitiés sauvages". [Torticolis et Frères]Torticolis et Frères
Premier roman 4/10 / Vertigo / 9 min. / le 21 octobre 2021

Shane Haddad

"Toni tout court" chez P.O.L

Toni est une jeune fille de vingt ans. Un premier personnage de fiction qui porte un prénom épicène, comme celui de son auteure, Shane Haddad, fille et garçon à la fois. C'est son anniversaire et le lecteur va passer une journée avec elle. Toni se réveille avec un air chagrin et va avancer dans sa journée à travers la ville, jusqu'au soir, jusqu'à un match de foot de l'équipe qu'elle supporte. Mal-être, malaise physique, ce récit qui alterne entre la première et la troisième personne montre que non, définitivement, vingt ans n'est pas (toujours) le plus bel âge de la vie.

Un extrait du livre: Toni joue la comédie pour faire rire les enfants. Ils rigolent, ils sourient. Les deux enfants se regardent avec toute la complicité de l’amitié. Si l’adolescence est une salope, l’autorité est une chienne. On ne peut pas le nier. Toni fait des grimaces. J’aimerais leur dire ce que je pense. J’aimerais leur dire qu’il faut venir chanter. Venez chanter tout ce que vous n’acceptez pas. Tout ce qu’au fond vous ne comprenez pas. Les compromis des parents. Les complications des adultes. Les regards qui ne sont pas pour vous. L’amour et le sexe. Venez chanter votre liberté d’enfant. Celle qui est couvée, celle qui ne redoute pas. On ne redoute pas."

Shane Haddah est elle-même une grande supportrice de foot, un monde qu'elle a découvert vers 16-17 ans. Elle a donc transposé cette passion à son personnage de 20 ans, l'âge qu'elle avait au moment d'écrire le roman. L'ambiance et l'idée viennent donc tout droit de son expérience personnelle. "Avec cette écriture à deux voix, un effet de miroir s'est mis en place tout au long de l'écriture pour me donner la place, en tant qu'autrice, de réfléchir sur mon propre personnage, mais aussi pour que le personnage puisse vivre et être questionné".

>> A écouter, l'entretien avec Shane Haddad :

La pochette du livre de Shane Haddad, "Toni tout court". [Ed. P.O.L.]Ed. P.O.L.
Premier roman 5/10 / Vertigo / 8 min. / le 22 octobre 2021