Dýja, protagoniste du dernier ouvrage d’Audur Ava Olafsdottir, descend d’une longue lignée de sages-femmes islandaises. Avant elle, il y avait sa grand-tante Fifa, celle qui à force de se frotter aux mystères de la vie et de la mort était devenue une sorte de sage, un personnage mystérieux et très indépendant d’esprit.
La mère et la sœur font exception à la tradition familiale: l’une travaille dans les pompes funèbres, l’autre est météorologue. Chacune voit la marche du monde à travers sa lorgnette, déformante, forcément.
Une voix singulière de la littérature islandaise
Audur Ava Olafsdottir est née en 1958 et vit à Reykjavík. Elle est une voix de la littérature islandaise, une voix très singulière. Premier choc avec "L’embellie", sorti en français chez Zulma en 2012. Depuis, six autres romans sont parus. Dans chacun, les personnages d’Audur Ava Olafsdottir ont quelque chose de très "Nouvelle vague", comme une désinvolture qui enrobe leurs interrogations existentielles, un sentiment grave d’absurdité et, à la fois, un amusement secret qu’ils partagent avec nous.
Tante Fifa disait: quand je pense que ce poète pesait seulement 3,5 kilos à sa naissance.
"L’homme est le seul animal à écrire de la poésie", déclare Audur Ava Olafsdottir. Poésie, philosophie, fascination pour la science et inquiétude souterraine: on trouve tout cela dans "La vérité sur la lumière". Il y a les baleines, qui reviennent inlassablement s’échouer sur les plages islandaises comme sur les pages de ses romans. C’est une thématique centrale, chaque fois plus aigüe: la crise climatique, qui frappe tout particulièrement ce bout de terre.
Des personnages modelés par l'Islande
Quant à l’île, elle est comme un personnage à part entière, un lieu d’isolement géographique, linguistique, à la fois douloureux et source d’inspiration constante pour l’autrice. "Je trouvais très étrange ce destin d’être née là-bas", confie-t-elle, prise de vertige dans sa jeunesse en découvrant sur les cartes la distance qui sépare l'Islande des continents.
Et, bien sûr, ses personnages sont modelés par cette terre noire, difficile, ingrate, changeante et aussi capable de l’éblouissement des aurores boréales. Stoïques, taciturnes, faisant face aux ouragans et aux tsunamis comme aux crises. Audur Ava Olafsdottir raconte aussi que face à la pandémie, la population islandaise s’est organisée en une journée…
Je considère quand même ce roman comme une ode à la vie.
Dans "La vérité sur la lumière", on commence par une naissance, par une description tout à fait marquante de ce qu’est notre arrivée sur Terre: "J’enfile mon masque et ma blouse. Nous y voilà. L’expérience la plus périlleuse dans la vie d’un être humain. La naissance. La tête apparaît et, quelques instants plus tard, je tiens dans mes mains le petit corps gluant et couvert de sang. C’est un garçon. Il ne sait qui il est, ni qui l’a mis au monde, ni ce qu’est le monde".
Isabelle Carceles/sb
Audur Ava Olafsdottir, "La vérité sur la lumière", traduit de l’islandais par Eric Boury, ed. Zulma.
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