Lisa Voisard à la découverte des œuvres d’arbres dans "Arborama"

Reprenant les codes de son "Ornithorama", paru en 2020 chez le même éditeur Helvetiq, Lisa Voisard, graphiste, illustratrice et musicienne, se lance à la poursuite de cinquante arbres d’Europe. Plus faciles à capturer que des oiseaux, il n’en a pas moins fallu à l’illustratrice des centaines de croquis pour arriver à rendre les racines magiques du peuplier d’Italie, l’esprit torturé du platane ou même l’if, ce conifère au feuillage épais qui aime les sous-bois sombres et humides.

Les planches d’observation ont été le plus fun à faire. Peut-être parce que j’ai été bercée par l’iconographie un peu vintage des planches botaniques. Certains arbres étaient plus faciles à dessiner que d’autres. Le séquoia m’a donné du fil à retordre, de même que l’if qui prend plein de formes différentes. C’est peut-être parce que ce sont des arbres mystérieux et ce n’était pas évident de rendre ce mystère en illustration, en 2D.

Une poésie rigoureuse

Dans les pages, les arbres promènent leurs silhouettes. Ils sont tordus, ou élancés, coniques, pleureurs, ou tabulaires. L’autrice s’est beaucoup documentée pour que son ouvrage soit scientifiquement exact. Mais elle ouvre le champ des histoires et propose, avec son guide d’observation, la poésie d’une fleur hermaphrodite, les petits poils blanc cachés dans les nervures des feuilles du tilleul. Les noms se déclinent à la Prévert: akène, bractée, bourgeons alternes. Lisa Voisard souligne que chaque arbre a une signature graphique spécifique.

Je n’avais jamais dessiné d’arbres avant, sauf en décor. Pas comme sujet principal d’une illustration. J’ai beaucoup aimé essayer de leur trouver une silhouette et, par rapport aux oiseaux, on peut un petit peu se lâcher, car c’est assez organique et varié dans les formes. L’oiseau, si on fait le bec de travers ou l’œil trop haut, a l’air bizarre. L’arbre apporte une liberté.

Lisa Voisard observe et collectionne les branches, les feuilles, les lichens, les cônes de l’épicéa, nos jolies pives ou les samares, les hélicoptères des érables. Elle documente la multitude des écorces. L’œil averti, elle doit décider quelle couleur leur donner. Multitude de verts, de jaunes, de bruns, de beiges ou d’oranges. C’est la graphiste qui parle, de même que l’apprentie botaniste, car on ne confond pas la couleur de la cerise avec celle de la griotte, la feuille du chêne et celle du frêne.

A la recherche de l'arbre

Suite logique du premier livre, "Arborama" nous permet, sans complexe, d’aller observer la nature qui nous entoure. On y apprend en s’amusant. Le livre ne s’adresse pas qu’aux enfants. L’autrice nous emmène dans un voyage à travers les saisons, dans le monde fascinant de ces êtres immobiles, tous pourvus de fleurs, leur seul organe sexuel. Vivants, interactifs, ils nous sont absolument indispensables.

Les animaux, c’est quand même quelque chose que j’aime depuis toute petite. Mais pour les enfants, je me dis que c’est intéressant de raconter que l’arbre n’est pas tout seul dans son parc, dans son jardin. Il est habité et il cohabite avec plein d’espèces.

Lisa Voisard pose la question basique et tente d’y répondre: qu’est-ce qu’un arbre? Il en existe plus de 60’000 espèces. Ils ont tous une importance écologique, sont de véritables havres de paix pour les animaux, indispensables à nous autres humains. "Arborama" nous donne les codes pour les identifier: silhouette, feuilles ou aiguilles, fleurs, fruits, écorce, forme, habitat, longévité. Les connaître, c’est peut-être apprendre à les préserver, de même que les biotopes qu’ils abritent.

Catherine Fattebert/sb

Lisa Voisard, "Arborama", paru aux éditions Helvetiq.

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