Ce projet de fusion doit encore être validé par les autorités de la concurrence européenne. Mais pour diverses raisons, il inquiète profondément les éditeurs concurrents, les libraires et les auteurs.
Si cela se concrétise, le marché suisse serait également concerné. Et pour cause: plus de 80% des livres vendus dans les librairies romandes viennent de France.
Parmi ces livres, la moitié sont issus de ces deux groupes: Editis et Hachette qui ont des filiales dans notre pays, avec des maisons comme Grasset, Fayard, Stock, Le Livre de poche, Larousse ou encore Robert Laffont. Des maisons qui publient des ouvrages littéraires, mais aussi des BD, des livres pratiques, des guides, et même des manuels scolaires.
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Diversité éditoriale menacée
Ainsi, la fusion de ces deux géants de l'édition et de la distribution représente un risque en matière de diversité éditoriale. Les auteurs qui vendent le plus pourraient être favorisés au détriment des découvertes ou des auteurs plus "confidentiels".
Pour le moment écrivains, éditeurs et libraires observent ce projet de loin. Car la plupart des auteurs en Suisse ne sont pas dépendant des grands groupes éditoriaux français. Il n'y a donc pas de préoccupations majeures.
Malgré tout, ces acteurs craignent qu’un tel projet ait des conséquences indirectes. Comme pour les libraires, ils pourraient notamment avoir certaines obligations au niveau de l'approvisionnement en livre ou l’obligation d’appliquer certaines marges. Et si les librairies sont fragilisées, les maisons d'éditions en Suisse le seront elles aussi.
Prisme d'extrême droite?
Le milliardaire français, auditionné le 19 janvier dernier devant le Sénat, a assuré que cette opération était "un projet uniquement économique", "sans arrière-pensée politique ou idéologique".
Sauf que beaucoup d'observateurs n'y croient pas. Pour beaucoup, Vincent Bolloré imposera à ses maisons d'éditions son prisme d'extrême droite, comme il l'a fait au sein de ses chaînes de télé et de radio françaises.
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Renforcer les liens
Mais sur le plan purement économique, il est vrai qu'un tel mastodonte, s'il voit le jour, aurait la capacité de renforcer les liens entre les différents secteurs de la création: médias, littérature, cinéma, musique, jeux vidéo, spectacle...
Il pourrait ainsi par exemple décliner très facilement un livre sur d'autres supports, comme des séries ou des films. Vincent Bolloré se retrouverait alors aux commandes d'un empire culturel à la force de frappe inégalée.
Natacha Van Cutsem / Foued Boukari / hkr