Racha Belmehdi a écrit un premier essai renversant intitulé "Rivalité, nom féminin". Le mythe de la rivalité féminine est un sujet souvent balayé par les féministes. Racha Belmehdi ose la thématique, dans une ère post #Metoo, alors que le monde découvre enfin le concept de sororité.
Mais si le mythe de la rivalité féminine, induit par la misogynie intériorisée, est ignoré des sciences sociales, il est partout autour de nous. Sur les écrans, dans les livres, dans la vraie vie aussi. C'est ce que démontre l'autrice française dans cet essai, véritable outil d'émancipation favorisant la compréhension mutuelle, l'amour de soi et de l'autre, pour enfin entrer dans la sororité.
Questionner la misogynie intériorisée
Racha Belmehdi a grandi entre la Côte d'Ivoire, la Russie et l'Algérie. Elle étudie le journalisme à Paris et devient rédactrice mode. Elle écrit pour les Inrocks, l'Express, entre autres. Elle écrit aussi des paroles de chansons pour son conjoint Yann Le Razavet, chanteur du groupe Marble Arch.
Aujourd'hui, parce que l'on vit de grands renversements féministes, Racha Belmehdi a eu envie de "donner des bases saines à toutes ces femmes qui sont arrivées récemment dans le féminisme et qui sont peut-être un peu perdues dans ces nouvelles injonctions", explique-t-elle à la RTS. Pour poser ces bases, il fallait à l'autrice s'attaquer au sujet de la misogynie intériorisée pour expliquer la misogynie. "De toute façon, on vit dans une société sexiste et patriarcale. Les femmes, finalement, sont pétries de ce sexisme tout autant que les hommes", souligne Racha Belmehdi.
Une sororité à construire
Sur la couverture du livre de Racha Belmehdi figure une photo culte de 1957, celle de Sophia Loren et Jayne Mansfield. Une des premières photos qui sort sur Google lors que l'on recherche "rivalité féminine".
Sur la photo, l'actrice Sophia Loren a un regard oblique sur la poitrine de l'actrice et mannequin Jayne Mansfield. L'autrice explique qu'à cause de notre conditionnement social, "on serait tenté de penser qu'il s'agit de mépris, de jalousie. Mais quand on a l'explication qui est arrivée quelques années plus tard, c'est-à-dire que Sophia Loren a donné une interview dans laquelle elle explique ce cliché, on comprend que ce n'était pas du tout un regard de mépris, mais uniquement de la sollicitude envers Jayne Mansflield parce qu'elle avait peur que sa poitrine déborde et qu'elle soit embarrassée en public. Au final, ce n'était pas du tout de la rivalité, mais de la sollicitude".
Racha Belmehdi ne croit pas "pour le moment" en la sororité: "C'est le fruit de beaucoup de travail, c'est le fruit d'une déconstruction, c'est le fruit d'une autocritique. Les choses telles qu'elles sont, pour moi, ne se prêtent pas encore à la sororité, non."
Propos recueillis par Julie Evard
Adaptation web: Lara Donnet