La bande dessinée va bien, le secteur est florissant. En France, en 2021, un livre vendu sur quatre est une bande dessinée (dont la moitié sont des mangas). C’est deux fois plus qu’il y a dix ans et c’est à peine moins que les œuvres de littérature générale.
Près de 900 millions d’euros de chiffre d’affaires, 85 millions d’exemplaires vendus, 7,2 millions de lectrices et lecteurs! Ces chiffres de l’institut GFK donnent le tournis. Ils font le bonheur des vendeurs de livres et des actionnaires des maisons d’édition.
Pourtant, au bout de la chaîne, les autrices et auteurs tirent la langue. En France en 2015, les états généraux de la bande dessinée, vaste enquête au niveau national sur la situation réelle de toutes les actrices et acteurs du domaine, mettent en lumière cet aspect. Cette publication suscite plusieurs manifestations, notamment au festival internationale de la bande dessinée d’Angoulême.
En 2020 arrive le rapport Racine, commandité par Frank Riester, le ministre de la Culture de l’époque, qui rajoute une couche à la bisbille et pousse même le président Macron à venir à Angoulême rencontrer des autrices et auteurs pour écouter leurs doléances.
Car si les BD se vendent bien, elles sont énormément à apparaître sur les étals chaque mois. L’année dernière, ce sont plus de 5'000 bandes dessinées qui sont entrées en librairies tous secteurs confondus. Pour la BD franco-belge, ce sont presque 2'300 titres.
Mais elles ne se vendent pas toutes comme un "Astérix". La plupart des titres sont tirés au-dessous des 10'000 exemplaires. Et c’est là que le bât blesse: les artistes sont rémunérés par un pourcentage sur le prix de vente des livres, entre 8 et 12% selon la générosité des éditeurs.
Ce pourcentage est encore plus bas (6%) dans le cas de livres jeunesse illustrés. Un pécule qui est à partager entre dessinatrices et dessinateurs, scénaristes, coloristes, et designers, selon les ouvrages. Celui-ci ne sera perçu qu’après que l’avance octroyée par l’éditeur a été remboursée. Bien souvent ce montant n’est jamais atteint.
Pour résumer, les ventes de bandes dessinées représentent un énorme gâteau qui est découpé en toutes petites tranches.
Dans les faits, en France, la plupart des artistes de bandes dessinées vivent sous le Smic (salaire minimum de croissance, env. 1'600 euros brut) et 30% d’entre eux sous le seuil de pauvreté.