On ne le répétera jamais assez. L'inventeur de la bande dessinée est suisse. Le Genevois Rodolphe Töpffer (1799-1846), fils de peintre, est l'auteur des premiers récits illustrés et textés qu'il appelle "littérature en estampes". Comme son père, cet érudit veut devenir peintre. Une maladie des yeux l'en empêche. Il se consacre donc au dessin. Toujours. Partout. Il est prolifique.
Il édite lui-même ses premières histoires qu'il distribue de librairie en librairie. Des bouquins imprimés à l'horizontale, dits "à l'Italienne" comme "L'histoire de M. Jabot" (première édition publiée en 1833). Le succès est fulgurant. A peine les premiers exemplaires arrivés à Paris qu'apparaissent déjà les premières contrefaçons. Le modèle narratif "töpfferrien" et son procédé d'impression exclusif se propagent. Gustave Doré s'y essaie. La bande dessinée est née.
De son vivant, Rodolphe Töpffer est conscient de son invention. Il sait que son langage va être utilisé par d'autres. Et c'est le cas!
A la fin du XIXe siècle, de nombreux dessinateurs marchent dans les pas du pionnier, dont quelques Suisses. La plupart publient des planches dans des revues satiriques, principalement à Paris. Mais de cette époque jusqu'à l'après-guerre, la scène suisse reste modeste.
Derib et Cosey
Il faut attendre jusqu'à la fin des années 1960 pour qu'un nouveau nom émerge: Derib. La bande dessinée est alors principalement consommée dans les magazines jeunesse que sont les journaux de Tintin ou de Spirou. C'est d'ailleurs dans ce dernier que le dessinateur de Yakari signe ses premières histoires en 1967, alors qu'il apprend le métier depuis longtemps déjà dans les studios Peyo à Bruxelles, notamment en dessinant des Schtroumpfs.
Alors que la BD connaît son premier âge d'or, Derib est son seul représentant suisse. En 1970, il rencontre Cosey et le forme. Il le pousse rapidement à créer sa propre histoire. Le personnage de Jonathan naît cinq ans plus tard, dans les pages du journal de Tintin. Le succès est immédiat. Le 7e tome des aventures du baroudeur amnésique est récompensé par le prix du meilleur album au festival d’Angoulême.
En 2017, trente-cinq ans plus tard, Cosey y reçoit la récompense suprême pour un auteur de BD, le Grand Prix.