Riad Sattouf conclut avec maestria sa série autobiographique "L'Arabe du futur"

A la fin du tome 5 de "L'Arabe du futur", sorti en 2020, on avait laissé Riad Sattouf, adolescent boutonneux, en Bretagne. Sa mère tentant sans succès de récupérer son frère cadet, Fari, enlevé par son père, reparti vivre en Syrie.

Véritable phénomène d'édition, cette série autobiographique sur la jeunesse difficile du bédéiste, né à Paris d'un père syrien et d'une mère française, et dont l'enfance s'est déroulée entre la Libye, la Syrie et la France, a été traduite en 23 langues et vendue à plus de 3 millions d'exemplaires.

Interrogé dans le 19h30, Riad Sattouf décrypte le succès de la série: "Quand j'ai commencé à faire 'L'Arabe du futur' en 2014, j'ai pensé en priorité cette bande dessinée pour les gens qui n'en lisaient pas, qui n'aimaient pas et qui n'y connaissaient rien du tout. Ma première lectrice rêvée était ma grand-mère bretonne qui méprisait totalement la bande dessinée. Je voulais en faire une qu'elle aurait aimé lire. Et c'est en réfléchissant à cela que j'ai réussi à toucher un public beaucoup plus large que celui que j'avais jusque-là."

Une relation difficile avec son père

Le sixième et dernier tome de la série couvre la période 1994 à 2011, de la fin du lycée aux débuts, difficiles, de Riad Sattouf comme auteur de bandes dessinées.

Au centre de son récit figure toujours sa relation compliquée avec son père, vis-à-vis duquel Riad se montre de plus en plus sévère. Ils ne communiquent plus qu'à travers quelques échanges épistolaires. Un père absent donc, mais présent dans les pensées de ce fils, toujours déchiré entre ses deux origines. "Ti crois un Arabe va faire di bidis [des BD] dans ce pays de racistes?", imagine-t-il par exemple dans la bouche de son père.

Ce dernier tome, teinté de nostalgie et d'émotions, s'immisce encore un peu plus dans l'intimité de son auteur, sans perdre pour autant son côté humoristique, composante importante du succès de la série.

J'étais tiraillé entre un père qui était quasiment islamiste et un grand-père breton obsédé sexuel et naturiste. Je devais trouver ma personnalité entre ces deux extrêmes. Je me suis choisi assez vite une autre identité qui était celle des auteurs.

Une fin décidée de longue date

C'est sans tristesse particulière que le Franco-Syrien a mis fin à cette saga, lui qui avait décidé dès le début que l'événement relaté à la toute fin de ce sixième tome en serait le point final, puisque c'était cet épisode qui lui avait donné envie d'écrire "L'Arabe du futur". La seule inconnue était de savoir en combien de pages il parviendrait à raconter son histoire.

"J'ai le sentiment d'avoir atteint le bout d'une route. Mais j'ai plein de projets et beaucoup d'idées. Je n'ai pas prévu de prendre ma retraite", conclut le bédéiste.

Propos recueillis par Philippe Revaz

Adaptation web: Andréanne Quartier-la-Tente avec afp

Riad Sattouf, "L'Arabe du futur. Une jeunesse au Moyen-Orient (1994-2011)". Tome 6, Editions Allary.