Pendant une année, Tassilo Jüdt et Thierry Raboud ont arpenté les terrasses de Lavaux, de l’aube au coucher de soleil, séparément et ensemble. Armés de leur crayon, de leur stylo, de leur calepin et d’une bonne dose de sensibilité.
Ce paysage, Thierry Raboud l’a traversé de nombreuses fois à vélo électrique ou à pied avec toujours le désir de trouver un autre Lavaux. Un exercice délicat et ambitieux. "C’est un paysage saturé artistiquement. Beaucoup d’écrivains et d’artistes sont passés par là. Jacques Chessex disait 'le lac est comme un grand encrier où tout le monde a déjà trempé sa plume'. Comment est-ce qu’on ose ajouter une couche sur toutes les couches préexistantes? C’était un assez grand défi pour moi."
Le crayon gris pour prolonger la rencontre
La naissance de "Lavaux d’ombres" est un heureux hasard: Tassilo Jüdt, qui a toujours un carnet de croquis sur lui, avait pris l’habitude de griffonner des cartes postales du paysage durant ses trajets matinaux pour se rendre à son atelier, à Vevey. Le sort a voulu qu’elles atterrissent entre les mains de Thierry Raboud qui, à leur réception, a immédiatement senti une résonance avec sa poésie. Une résonance qui se prolonge dans la matière même des dessins, car les croquis ont gardé le trait de départ, à savoir le crayon gris.
Dix mille terrasses sous la cymbale exacte du soleil, orchestrent l’éternel été
Pour Tassilo Jüdt, il y a deux raisons à ce choix: "Le travail que j’avais commencé sur Lavaux dans les cartes postales, avait été composé au crayon gris et je souhaitais le prolonger. Et puis, il faut dire que le gris se prête bien à la poésie. Lorsque l’on met de la couleur, tout est interprété et l’on sait quel est le moment de la journée, et même s’il fait chaud ou froid. Tandis que le crayon gris s’apparente à une photographie noir blanc, où l’on laisse celui qui va voir l’image se plonger dans sa propre temporalité", explique-t-il.
Thierry Raboud et Tassilo Jüdt partagent une belle complicité, dont ce beau-livre gorgé de mystère et de lumière est le fruit. Au fil du recueil, le dialogue entre écriture et illustration devient de plus en plus étroit, comme un écho entre le poète et le dessinateur.
Layla Shlonsky/mh
Thierry Raboud et Tassilo Jüdt, "Lavaux d’ombres", disponible à la librairie Payot de Vevey, à la librairie La Fontaine ainsi que sur le site web de Tassilo Jüdt