Publié

"Bandes originales et cinéma de genre", un mariage heureux signé Ludovic Villard

Le rappeur, poète et écrivain lyonnais Ludovic Villard. [Le mot et le reste]
Entretien avec Ludovic Villard, auteur de "Bandes originales et cinéma de genre : de Psychose à Blade Runner" / QWERTZ / 23 min. / le 28 septembre 2023
Le rappeur, poète et écrivain lyonnais Ludovic Villard remonte à l'origine fantasmagorique du cinéma de genre. Une sélection de cent chef d’oeuvres à voir et entendre intitulée "Bandes originales et cinéma de genre".

C’est une relation intime qui n’aura échappé à personne: celle qui unit les images d’un film et sa bande originale. Une danse qui passionne depuis toujours Ludovic Villard, que ce soit dans son métier d’écrivain ou de rappeur (sous le pseudonyme Lucio Bukowski), si bien qu’il a fini par la coucher sur papier.

Dans "Bandes originales et cinéma de genre", on voyage dans un âge d’or allant du Japon jusqu’aux Etats-Unis en passant par l’Angleterre, la France, l’Italie et la Russie, pour la centaine de films que propose l’ouvrage. Un choix étalé sur une vingtaine d’années, entre la sortie de "Psychose" d’Alfred Hitchcock (1960) et "Blade Runner" de Ridley Scott (1982).

A la toute fin des années 50, on a de nouvelles façons de concevoir les bandes originales, on développe la psychologie des personnages, on sort du schéma manichéen du gentil et du méchant; on parle de sexe, et ça va vraiment créer quelque chose de nouveau.

Ludovic Villard

Un tournant dans le cinéma

Situer son point de départ avec "Psychose" n’est pas dû au hasard. L’auteur choisit ce film car il est "emblématique à tous points de vue". La mise en scène d’abord, puis la musique, signée d’un Bernard Herrmann coincé financièrement, et qui proposera à Hitchcock de se contenter d’une bande originale avec des cordes, plutôt que symphonique. Un choix qui fera entrer le film dans l’histoire, et qui le rendra reconnaissable même pour celles et ceux qui ne l’ont jamais vu.

L’acmé explose lors de la scène de la douche: l’ombre qui s’approche derrière le rideau, l’apparition de la mère levant le couteau, le staccato des violons furieux, (…) le glissando du violoncelle en questions/réponses avec les pizzicati de violon, la contre-plongée sous le jet d’eau, le sang qui fuit dans la bonde, suivi d’un gros plan sur l’oeil vitreux.

Extrait de "Bandes originales et cinéma de genre" de Ludovic Villard

Au commencement, le cinéma de genre

Le cinéma, c’est d’abord le cinéma de genre, explique Ludovic Villard. Lorsque Georges Méliès réalise ses premiers films, ce n’est pas la vie d’un couple bourgeois divorcé qu’il choisit de raconter, mais "des histoires de squelettes, de morts qui reviennent à la vie, de conquête spatiale". Des "diableries" directement héritées de la lanterne magique, invention du XVIe siècle, qui permet de "projeter quelque chose qui n’existe pas". C’est donc avec ces "fantasmagories", ce "proto cinéma fantastique", que la musique va faire son entrée pour accompagner l’image "avec des orchestres, mais aussi avec des bruitages", commente encore Ludovic Villard.

Couverture du livre "Bandes originales et cinéma de genre" de Ludovic Villard. [Le mot et le reste]
Couverture du livre "Bandes originales et cinéma de genre" de Ludovic Villard. [Le mot et le reste]

Ainsi, au fil des pages de l’ouvrage se mélangent classiques du cinéma reconnus et "films de genre": d’un côté on trouve "2001, l'odyssée de l’espace" de Kubrick, "Les yeux sans visage" de Georges Franju, "Bullit" de Peter Yates, ou encore les films d’Akira Kurosawa, et de l’autre, "Mad Max" de George Miller, "Evil Dead" de Sam Raimi ou "Conan le barbare" de John Milius. "Le but de ce bouquin, c’est la symbiose qui naît entre un film et sa bande originale, souligne encore Ludovic Villard. Un film excellent avec une mauvaise musique était obligatoirement expulsé de ma liste, et inversement également".

C’est "Blade Runner" de Ridley Scott (1982), qui referme la sélection, avec sa bande originale de Vangelis. Un choix stratégique pour l’auteur qui estime qu’à partir de ce moment, il y a une frontière posée par l’Amérique de Reagan, plus morale et conservatrice. Elle ouvrira l’ère des blockbusters, avec un retour aux bandes originales symphoniques comme celles de John Williams, moins expérimentales et plus attendues. Une période que Ludovic Villard n’exclut pas de traiter dans un prochain ouvrage.

Ellen Ichters/sc

Ludovic Villard, "Bandes originales et cinéma de genre - De 'Psychose' à 'Blade Runner'", ed. Le mot et le reste.

Vous aimez lire? Abonnez-vous à QWERTZ et recevez chaque vendredi cette newsletter consacrée à l'actualité du livre préparée par RTS Culture.

Publié