Fasciné par la Seconde Guerre mondiale, l'homme de radio Philippe Collin a découvert l'existence de Frank Meier il y a une vingtaine d'années. Originaire de Bretagne et venant d'un milieu modeste, Philippe Collin est fasciné par le Ritz quand il arrive à Paris, mais n'ose pas y entrer.
Il lui faudra attendre son premier salaire pour découvrir un monde captivant et hanté par les fantômes du XXe siècle. Ernest Hemingway, Jean Cocteau, Coco Chanel, Sacha Guitry ou encore Ella Fitzgerald, tous fréquentent le mythique hôtel parisien. Et pour leur servir des cocktails, il y ce barman mystérieux, Frank Meier, vedette de l'entre-deux-guerres désormais tombée dans l'oubli.
Un travail de longue haleine
Il faut avouer que le profil de Frank Meier détonne. Né en Autriche et d'origine juive, il s'engage dans la Légion étrangère, contre son pays d'origine, durant la Première Guerre mondiale. Frank Meier part ensuite aux Etats-Unis et devient une star du cocktail. A son retour en France, il se fait naturaliser et devient en 1921 le barman attitré du Ritz.
Philippe Collin décide de lui consacrer un roman. Il se met alors à collecter toutes sortes d'archives, pour mieux cerner sa personnalité et le contexte historique de l'époque. L'auteur égrène les correspondances, les journaux intimes, les articles de presse. Un travail pas toujours facile, car soucieux de sa légendaire réputation ("ce qui se passe au Ritz reste au Ritz"), le palace n'est pas toujours prompt à dévoiler qu'il a fait office de QG aux hauts dignitaires nazis pendant la Seconde Guerre mondiale.
Force de la fiction
Passionné d'histoire, Philippe Collin a réalisé de nombreux podcasts sur ce sujet, que ce soit sur Louis-Ferdinand Céline, Léon Blum, Molière ou Napoléon. Et le succès est au rendez-vous avec aujourd'hui vingt millions de téléchargements à la clé.
Pour écrire "Le barman du Ritz", l'auteur s'est basé sur les archives existantes, tout en gardant une certaine liberté. "Quand on fait de l'histoire, c'est comme si on avait un squelette, et les os ce sont les archives. On théorise, on réfléchit, on fait des hypothèses, mais on ne peut rien rajouter sur ces os", explique le journaliste dans l'émission Vertigo du 13 mai.
"En littérature, en revanche, en plus des os, on peut ajouter des muscles, de la peau, des sentiments, une psychologie. Cela permet une expérience au lecteur, détaille Philippe Collin. Celui-ci est plongé dans un bar luxueux, à Paris, durant l'Occupation. Il découvre les sentiments, les tiraillements, les angoisses et les désirs des personnages".
Des propos recueillis par Pierre Philippe Cadert.
Adaptation web: Sarah Clément
Philippe Collin, "Le barman du Ritz", ed. Albin Michel, avril 2024.