Modifié

Vingt ans après sa mort, Françoise Sagan demeure d'une éclatante modernité

L'écrivaine Françoise Sagan lors d'une interview à propos de sa pièce de théâtre "La Robe mauve de Valentine" en 1963. [AFP - Jean Claude Mallinjod]
Les années Sagan / Quartier livre / 55 min. / dimanche à 16:04
"Bonjour tristesse", ce roman phénomène signé François Sagan, a fait le tour du monde et ouvert une nouvelle ère dans les lettres et la culture françaises. Septante ans plus tard, et vingt ans après la disparition de son autrice, le 24 septembre 2004, que reste-t-il des années Sagan?

Au sortir de lʹhiver glacial de 1954, le premier roman dʹune jeune femme de 18 ans allait hausser dʹun coup la température de la France et du monde, mettant lʹunivers très masculin des arts et des lettres en ébullition en décrivant les relations amoureuses libres d'une adolescente. Septante ans plus tard, "Bonjour tristesse" nʹest peut-être plus aussi scandaleux, mais ses qualités littéraires sont intactes. Icône au rayonnement pérenne, exemple admiré dʹémancipation féminine, Françoise Sagan sʹest éteinte il y a tout juste vingt ans, le 24 septembre 2004.

Conservateur de l'œuvre et de la mémoire de l'écrivaine, son fils Denis Westhoff publie en cette année anniversaire un grand et beau livre, "Les années Sagan". Il y aborde la vie et le parcours de sa mère de façon à la fois chronologique et thématique.

Passions très diverses

Au fil des chapitres, on découvre quelques thèmes essentiels de la vie de la célèbre autrice: le phénomène littéraire "Bonjour tristesse", son travail de journaliste reporter, son amour de la vitesse - elle aimait les voitures de sport -, du jazz, de la chanson, son goût du jeu, ses expériences au théâtre et au cinéma, ou encore sa passion du cheval.

Cette série d'entrées montre à la fois la grande diversité de ses activités, de ses passions, et une grande fidélité aux différentes facettes de sa vie, puisque beaucoup de ces aspects apparaissent très tôt, dès le moment où elle devient un personnage célèbre.

>> A voir, une interview de Françoise Sagan dans l'émission de la TSR Préfaces en 1965, à l'occasion de la sortie de son livre "La chamade" :

En 1965 paraît La Chamade, sixième roman de la  jeune écrivain.
Françoise Sagan / Préfaces / 16 min. / le 17 septembre 1965

Sauver l'oeuvre littéraire

Françoise Sagan avait très tôt analysé que la légende pourrait éclipser l'oeuvre de l'écrivaine. Cette oeuvre, sur laquelle veille aujourd'hui son fils, compte une vingtaine de romans, plusieurs recueils de nouvelles, des pièces de théâtre, de nombreux livres de mémoire et d'entretien ainsi que des scénarios de film.

Denis Westhoff a raconté dans un précédent livre paru en 2012, "Sagan et fils", son parcours du combattant pour sauver l'oeuvre et la mémoire de sa mère. Dans des circonstances difficiles: à sa mort, Françoise Sagan avait laissé d'importantes dettes .

A la fin de sa vie, rappelle son fils dans l'émission Quartier livre du 22 septembre, ses ennuis personnels, moraux et d'argent ont quelque peu éclipsé sa carrière d'écrivaine. "Elle considérait que de toute façon, même si elle écrivait un livre, la totalité des revenus de ce livre allait immédiatement être saisie par le fisc. Et donc à quoi bon écrire un livre, interroge Denis Westhoff? Sa productivité a alors énormément baissé et comme certains de ses contemporains, elle a commencé cette descente dans l'oubli, d'une certaine manière".

"Elle a reconquis des territoires"

Après son décès, son fils s'attelle à faire rayonner l'oeuvre de Sagan, qu'il considère comme "très moderne et contemporaine". Il refait notamment éditer certains livres devenus introuvables. "Aujourd'hui, son oeuvre revit, ses livres se vendent, elle est toujours traduite dans de nombreuses langues. Elle a reconquis des territoires qui à l'époque étaient perdus, comme l'Amérique ou le Brésil, par exemple. (...) Les gens ont énormément de sympathie pour elle, en Europe ou ailleurs dans le monde. Elle a l'image d'une femme libre, gaie et sympathique", souligne Denis Westhoff.

Son écriture et ses livres sont marqués par sa liberté, son indépendance et sa modernité, plus que par ses engagements politiques, parcellaires, indique son fils. Les années Sagan sont surtout le miroir d'un temps aujourd'hui disparu, où "l'on était libre, on s'amusait, on faisait la fête, on était insouciant, sans contraintes, avec de l'argent et une totale liberté. Il faut reconnaître que c'est une époque aujourd'hui complètement révolue", conclut-il.

Sujet radio: Nicolas Julliard

Adaptation web: Melissa Härtel

Denis Westhoff, "Les années Sagan", éditions Gourcuff Gradenigo, mai 2024.

Publié Modifié

"Bonjour tristesse" adapté au cinéma

Quand on a demandé à l'écrivaine canadienne Durga Chew-Bose d'écrire une adaptation du roman "Bonjour tristesse" de Françoise Sagan pour le cinéma, elle s'est prise au jeu bien plus que prévu. Au final, non seulement elle a écrit le scénario, mais aussi réalisé le film.

Ce premier long métrage - version moderne du récit de Françoise Sagan sur la richesse, l'ennui, l'excès et la trahison - a été présenté en avant-première au festival international du film de Toronto (TIFF) le 6 septembre dernier. La date de sortie en salles n'est pas encore connue.

Lily McInerny incarne Cécile, une adolescente bourgeoise qui s'ennuie et qui rompt la monotonie d'un été sous le soleil du sud de la France en conspirant pour détruire Anne, la nouvelle petite amie de son père. Mais tout cela va avoir des conséquences imprévues sur la vie de son entourage, notamment celle de son père Raymond (Claes Bang), d'Elsa (Nailia Harzoune), la petite amie délaissée, et d'Anne (Chloë Sevigny), à l'origine une amie proche de la mère décédée de Cécile.

Il aura fallu près de huit années aux productrices Katie Bird Nolan et Lindsay Tapscott pour mener à bien ce projet. L'oeuvre de Françoise Sagan a déjà été adaptée sur grand écran par Otto Preminger en 1958 avec Jean Seberg.

"Même s'il a été écrit en 1954, il y avait quelque chose de très radical dans ce livre. Cécile agit uniquement en fonction de ses propres désirs, prenant ce qu'elle veut, comme elle le veut, quand elle le veut", a noté Lindsay Tapscott.

afp