On y trouve aussi bien les cerises sexy old school que la croix de Léviathan, un symbole sataniste, les crânes ailés des bikers, les inscriptions des gangs Chicanos (Américains d’origines mexicaines) ou encore des fans de steampunk (ce courant littéraire rétrofuturiste qui mêle l'esthétique du XIXe siècle industriel et la science-fiction).
Le livre donne l'impression d'un grand metling-pot où chacun peut faire son marché, entre genres bioniques, bouddhistes, japonais, ou maoris. Aujourd'hui, nous disent les sociologues, nous avons la liberté de construire notre identité, elle ne nous est plus dictée par notre milieu, notre éducation. Sauf que pour "s'encrer" dans le monde, dans le temps, dans une mythologie, les vieux symboles ont encore de beaux jours devant eux!
Les origines des motifs tatoués
Le bouledogue, par exemple, vient à la fois de Winston Churchill et des marines américains. Le cerf blanc se retrouve aussi bien dans les légendes arthuriennes, le récit biblique de Saint-Eustache, ou plus récemment dans la saga Harry Potter.
Les toiles d'araignée sur les coudes, quant à elles, sont un symbole issu du système carcéral russe. Elles signifient que vous avez passé beaucoup de temps derrière les barreaux (une toile d'araignée sur la main accompagnée d'une araignée indiquerait que vous êtes toxicomane, ou que vous avez commis un meurtre en prison).
Le tatouage comme un talisman
Le tatouage donne de la force face à l'adversité. Ce "pouvoir" que l'on attribue parfois au tatouage rappelle "L'homme illustré", très belle nouvelle de Ray Bradburry, maître de la science-fiction. Son héros essaie d'effacer ses tatouages par tous les moyens, car ils ont la fâcheuse tendance de prédire l'avenir.
Les tatouages symbolisent aussi le passage du temps, l'aspect éphémère de la vie. Ces encrages permanents, définitifs, censés nous accompagner toute la vie, être indélébiles, rappellent la disparition inéluctable de toute chose par le biais de motifs comme les crânes, les sabliers, les tombes, etc.
Le paradoxe du tatoué
Actuellement, lorsqu'on pense au tatouage, un constat s'impose. Comment, en ayant recours à ce vocabulaire de symboles mondialisés, être unique et "rebelle"? Peut-on encore réveiller les pirates modernes et hors-la-loi qui dorment en nous?
En Suisse, l'un des premiers salons de tatouage a ouvert le 1er mars 1980 à l'avenue d'Echallens, à Lausanne. "Tom Tattoo", le petit salon de Dominique Lang, existe encore aujourd'hui. C'est une institution. Lorsqu'il a ouvert, on gravait encore les peaux en appartement, en secret. Le tatouage était un signe social très stigmatisant, réservé aux mauvais garçons et aux prostituées. Aujourd'hui, tout le monde, ou presque, en a.
Julien Burri/ld