L’ouvrage de Gilberte Favre "Guggenheim Saga, de la Suisse à l’Amérique", journaliste vaudoise, est né de sa curiosité pour les racines helvétiques de la dynastie Guggenheim. Un parcours qui a permis aux descendants de Simon Guggenheim, pauvre tailleur juif de Lengnau, de faire fortune aux Etats-Unis en exportant la broderie de Saint-Gall avant d’investir dans les mines à Philadelphie puis de prospérer dans le monde de l’art.
Oublier la pauvreté
En 1792 naît Simon Guggenheim père. Il a 10 ans lorsque La guerre des Pruneaux (Zwetschgenkrieg) éclate à Lengnau et que les chrétiens essaient de faire fuir les juifs. Simon Guggenheim a fait un apprentissage de tailleur et se marie en 1824 avec une jeune femme très fragile, Charlotte, avec qui il aura six enfants, dont un garçon, Meyer. Charlotte tombe extrêmement malade, Simon Guggenheim est placé sous tutelle et les six enfants éparpillés. La famille connaît très tôt la pauvreté et l'humiliation.
La richesse aux États-Unis
En 1847, Meyer Guggenheim a 19 ans. Avec son père, ils décident de prendre le bateau pour se rendre aux États-Unis, à Philadelphie. À l'époque, la ville est le deuxième centre industriel du pays. Père et fils vont d'abord faire du colportage, en vendant rubans et crèmes pour les mains aux ménagères. Mais c'est grâce à la broderie de Saint-Gall qu'ils vont faire fortune pendant trente ans.
Meyer Guggenheim a une revanche à prendre. Séparé très jeune de ses soeurs, il a vu son père en proie à de graves difficultés, à la honte. Meyer rêve d'une famille soudée avant de rêver de richesse.
En 1880, grâce à la broderie, la famille Guggenheim possède déjà 800'000 dollars. En 1918, d'après Forbes, la famille se place au deuxième rang des plus grandes fortunes américaines et détient 80% des réserves mondiales de cuivre, de fer et d'argent. Ils possèdent aussi des mines un peu partout. À l'époque, la famille a une image de capitaliste assez redoutable.
Meyer Guggenheim décide de partir s'installer à New York. Ses deux plus jeunes fils, Benjamin et William ne le suivront pas, préférant quitter l'industrie familiale pour le monde de l'art et "les belles choses".
En 1918, selon Forbes, ils étaient aux 2e rang des fortunes américaines et ils détenaient 80% des réserves de cuivre, de fer et d'argent au monde.
L'addiction à l'art de Peggy Guggenheim
Benjamin Guggenheim, l'un des fils de Meyer Guggenheim, meurt dans le naufrage du Titanic. Sa fille, Peggy ne se remettra jamais de sa disparition. À 22 ans, elle retourne à Paris, où vivait son père.
Elle y fréquente des artistes et s'intéresse à l'art grâce à son père qui l'y a initié très jeune. Elle a l'oeil pour découvrir les talents et les artistes. Véritable passionnée, elle achète pendant un temps une oeuvre par jour. Elle possède des oeuvres de Dali, Picasso, Miro et bien d'autres.
Pendant la Seconde Guerre mondiale, elle rentre aux États-Unis avec plusieurs artistes dont elle finance le voyage et qu'elle a continué à aider, une fois arrivée à New York. Sans elle, on ne connaîtrait sans doute pas Jackson Pollock, Mondrian et d'autres grands artistes.
Les Musées Guggenheim
L'homme d'affaires Solomon Guggenheim, l'un des oncles de Peggy, était lui aussi passionné d'art. Il commence dès 1890 à collectionner les oeuvres d'art et en 1937, il créé la fondation Guggenheim à New York. C'est en 1949, après sa mort, que le fameux Musée Guggenheim de New York a été inauguré.
Les Guggenheim ont su s'entourer de grands architectes tels que Frank Gehry et Frank Wright pour réaliser leurs musées. Après Venise, New York et Bilbao, c'est à Abu Dhabi qu'ouvre en 2017 un autre Musée Guggenheim.
Famille créative unique, les Guggenheim ont vécu des destins variés. Ils ont tous contribué à faire connaître mondialement le nom de Guggenheim.
ld/mcc/swissinfo
"Guggenheim saga, de la Suisse à l'Amérique" de Gilberte Favre, Editions Z.
Endingen et Lengnau
Du 18e siècle à 1866, ces deux communes argoviennes furent les seules où les Juifs avaient le droit de s’établir durablement.
Sous la République helvétique (1798-1803), des réformateurs essayèrent de promouvoir la liberté d’établissement des Juifs. Dénonçant l’influence de la France, les opposants à la République helvétique se focalisèrent sur cette question, avec pour résultat la mise à sac des deux villages en 1802. L’Histoire se souvient de cet épisode sous le nom de Guerre des Pruneaux (Zwetschgenkrieg).
En 1862, le parlement du canton d’Argovie adopta une loi sur l’émancipation des Juifs. Mais les opposants lancèrent avec succès une initiative pour révoquer le parlement. Résultat, un nouveau parlement cantonal fut élu, qui révoqua la loi.
Avec la liberté d’établissement accordée au niveau fédéral en 1866, les Juifs quittèrent progressivement les deux villages pour s’installer ailleurs en Suisse. Mais en raison de cette longue présence, de nombreux Juifs suisses sont originaires de ces deux villages. C’est notamment le cas de l’ancienne présidente de la Confédération Ruth Dreifuss (Endingen).