La nouvelle est tombée fin janvier. Les vingt-cinq classes suisses, - quelques 500 élèves -, ont désigné "Permis C", paru en 2016 chez BSN Press, lauréat du Roman des Romands. En octobre 2017, c’était "Chaleur" paru en 2017 chez Finitude, qui avait mis d’accord le jury du Prix Polar du Festival Lausan’noir. Et aujourd’hui, le même "Permis C", paraît dans une version poche, chez Pocket, sous le titre – plus franco compatible - "Une saison en enfance".
Période faste! Auteur prolifique, avec humour, Joseph Incardona explore le plus souvent une veine noire et grinçante. Polyvalent. Il alterne polars, romans, nouvelles, écriture théâtrale ou scénarios. Co-réalisant notamment avec Cyril Bron le long-métrage "Milky Way" en 2014.
>> Notre dossier sur le film : "Milky Way", un film de Cyril Bron et Joseph Incardona
Parcours sans faute
Il est comme ça, Joseph Incardona: pugnace, enthousiaste. Il en veut. Tour à tour boxeur, footballeur, coureur, il se présente lui-même comme un "chasseur-cueilleur". Tous les matins, il part à la "chasse des mots", avec la rigueur et la discipline d’un sportif de compétition
Tout commence dans les années 2000. Joseph Incardona a 30 ans quand le virus de l’écriture le pousse à monter à Paris. Il laisse derrière lui les petits boulots, une compagne, le confort helvétique pour se donner toutes les chances. Première publication, "Le cul entre deux chaises", en 2002. Ainsi de suite… Aujourd'hui, une quinzaine d’ouvrages plus tard, l'Italo-suisse, revenu à Genève, vit de sa plume. Assez pour avoir tout récemment convaincu son père, que oui, écrire, c’est bel et bien un vrai métier.
André Pastrella, un alter ego
Personnage récurrent, André Pastrella était apparu dans "Le cul entre deux chaises" en 2002 et dans "Banana Spleen" en 2009. Un double, un alter ego. Le personnage et l’auteur partagent vécu et parcours. Dans "Permis C", devenu "Une saison en enfance", Joseph Incardona retourne sur le terrain sensible de l’enfance.
"Une saison en enfance", le roman
Dix déménagements en sept ans de scolarité, au gré des galères professionnelles du père italien. Quand André Pastrella échoue dans une barre d’immeubles de Genève, il a 12 ans. On est en 1978. Opulence impitoyable. Il est aussitôt le "Rital" de service. Même si sa mère est Suissesse. Même si, ou parce qu'il est intelligent? Rejeté. Cible de la cruauté ordinaire. Premiers émois. Amitiés foireuses. Dérive parentale... Écartelé entre la Suisse "spleen" et l'Italie soleil.
Quand il raconte cette saison en enfer, André est un adulte, devenu "un baiseur à la petite semaine". "Quoiqu’il arrive je serai toujours l’étranger". Le salut? Dans l'écriture. Coup de poing! Percutant.
André et Joseph, le salut dans les mots
André Pastrella vient d’obtenir son premier six en rédaction: "Une fois dehors, je me suis mis à courir, bien sûr que j’ai ri, j’ai même crié. J’avais peut-être trouvé le moyen de ne pas devenir fou, de modeler ma rage dans quelque chose qui serait comme des poings invisibles, chaque phrase comme un coup que je donnerais et qui ne ferait pas de moi le dernier des cons".
Eloquent. Et il y a fort à parier que le futur de Joseph Incardona s’est aussi décidé dans un cours de français.
Marlène Métrailler/mh