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Musicien, un métier éprouvant pour le corps

Des maux et des notes: les maladies des musiciens [Fotolia - Sergey Nivens]
Des maux et des notes: les maladies des musiciens / Magnétique / 53 min. / le 6 décembre 2018
Être musicien, c'est aussi mettre son corps en jeu, intensément. Alors parfois, ça casse, ça coince et ça fait mal. Dystonies, tendinites, ou problèmes d'audition sont une véritable hantise pour les musiciens professionnels.

Les musiciens n'aiment pas parler de leurs problèmes de santé, surtout quand ces derniers pourraient mettre en péril leur métier. "Quand on est musicien et que l'on rencontre des problèmes à jouer de notre instrument, on se dit d'abord que c'est un problème de technique, donc on n'ose pas en parler", explique Cindy Lin, clarinettiste à l'Orchestre de Chambre de Genève, au micro de la RTS.

Le métier de musicien est éprouvant pour le corps. Pourtant, les musiciens taisent bien souvent cet aspect de leur profession. Avouer que l'on est moins performant dans son jeu, c'est prendre le risque de se faire remplacer dans ce milieu très compétitif.

Des pathologies récurrentes

Il existe mille et une déclinaisons de faiblesses musculaires, de troubles des cordes vocales et autres. Mais certaines pathologies sont récurrentes chez les musiciens. Il existe les syndromes de surmenage tels que douleurs, tendinites, compressions vasculaires et nerveuses, induits par des positions maintenues ou des mouvements répétés.

On trouve aussi des dysfonctionnements appelés dystonies de fonction. Il s'agit d'un trouble du tonus musculaire lié à un mauvais signal envoyé au cerveau qui se traduit par des gestes involontaires. Dans les cas de dystonie, les musiciens pensent souvent, à tort, à un défaut technique et travaillent plus pour le résoudre ou le compenser. Une erreur, car c'est le travail qui finit par tout détruire.

Souvent, les gens qui ont les problèmes les plus graves, ce sont les gens les plus doués.

Isabelle Campion, kinésithérapeute à la Clinique du Musicien à Paris

La crampe du musicien

La dystonie est appelée vulgairement "la crampe du musicien". Elle concerne un geste que l'on n'arrive plus à faire sur son instrument, alors que le reste du temps, au quotidien, le corps se porte bien. "Il y a donc une grande partie émotionnelle dans ce mal", explique Aude Hauser Mottier, physiothérapeute spécialisée dans le traitement des musiciens et auteure d'un livre intitulé "La musique de la douleur".

En 2009, la clarinettiste Cindy Lin a commencé à ressentir des lourdeurs dans son petit doigt, problématique dans l'utilisation de sa clarinette. Elle décide de travailler davantage. Elle force. Pourtant un an plus tard, sa situation ne s'est pas améliorée. Après plusieurs démarches infructueuses chez des spécialistes de la main, elle découvre finalement au cours d'une discussion avec d'autres musiciens qu'elle est sans doute atteinte de dystonie. Elle n'en avait jamais entendu parler.

La prévention pour éviter les accidents

La dystonie de fonction se soigne, mais cela prend du temps et demande beaucoup de patience. Les musiciens doivent arrêter de jouer. "Il faut une rééducation très lente, qui peut durer une année ou deux", explique Aude Hauser Mottier au micro de la RTS.

Pour tenter de la traiter, certains médecins prescrivent des médicaments prévus initialement pour traiter le Parkinson (cette maladie dégénérative qui résulte de la mort progressive de neurones du cerveau et entraîne progressivement des anomalies de mouvement), un syndrome similaire sur bien des points avec les cas de dystonie. Cependant, avant de guérir les problèmes de santé, il est possible d'en éviter un certain nombre grâce à des cours de posture et la prévention des pathologies dans les orchestres et les écoles de musique.

Aussi, pour anticiper sur ces maux, Isabelle Campion, kinésithérapeute à la Clinique du Musicien à Paris, commence par ces conseils, simples mais précieux: avoir une bonne posture, faire des échauffements avant de jouer, faire des étirements après le jeu, et pratiquer une activité physique régulière.

Propos recueillis par Anya Leveillé et Benoît Perrier

Adaptation web: Lara Donnet

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