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Les animaux et la musique: un incroyable talent?

Une petite fille joue de la flûte traversière à un cheval. [Fotolia - Sharon Kam]
Hennissements et pépiements: les animaux et la musique / Magnétique / 49 min. / le 13 décembre 2018
Les étourneaux imitateurs, les dauphins chanteurs, les primates vocalistes: des musicologues, des compositeurs et des interprètes partagent des observations et des expériences qui mettent à mal nos préjugés.

Les animaux ont-ils un véritable "sens musical"? En matière de musique comme ailleurs, la présupposée suprématie humaine a la peau dure. La question de savoir si les animaux "apprécient" la musique n’a été posée que fort récemment. Même le chant des oiseaux n'était considéré que comme un langage, certes merveilleux, mais dépourvu de conscience esthétique.

A la découverte de la musicalité des animaux

Depuis une quinzaine d’années, de multiples observations remettent en cause cette façon de hiérarchiser et classifier les expressions musicales du vivant. La zoomusicologie notamment - ce courant de pensée conduit par le musicologue et compositeur François-Bernard Mâche - démontre en quoi le jeu musical est un jeu poétique et naturel, qui s’esquisse déjà dans le monde animal.

"Les insectes, quelques araignées, certains poissons, les amphibiens, émettent des signaux sonores. Mais c’est évidemment parmi les oiseaux et les mammifères que cette possibilité est la plus développée sur le plan de la diversité et de la quantité. Les mammifères sont moins doués pour les sons, cependant la baleine à bosse, le loup, le gibbon présentent des manifestations sonores ordonnées et intéressantes."

La distinction entre langage et musique

Longtemps, on a pensé que les sons émis par les animaux relevaient de la simple communication. Un parti pris qui exclut toute hypothèse esthétique dans la production sonore des animaux. Dans son ouvrage, "Musique-Mythe-Nature" (éditions Aedam musicae), François-Bernard Mâche nuance le parallèle trop souvent fait entre la musique et le langage, pour rappeler que "le langage et la musique sont dans un rapport de fraternité et non de filiation".

Seul un préjugé et un manque de culture générale fait considérer les vocalises animales plutôt comme un langage rudimentaire que comme une musique rudimentaire. Elles en offrent pourtant les caractéristiques.

François-Bernard Mâche, compositeur, musicien et zoomusicologue.

François-Bernard Mâche a souvent intégré dans ses oeuvres des sons élémentaires ou animaux. Il voit d'ailleurs des analogies dans la musique humaine et celle des oiseaux. Il rapproche par exemple le chant du rouge gorge des "Variations" de Schönberg, ou celui des fauvettes aquatiques de la rythmique du "Sacre du printemps" de Stravinsky.

Des vocalises inter-espèces

A la Ménagerie du Jardin des Plantes à Paris, l’un des plus anciens zoo d’Europe (1784), on fait depuis longtemps des expériences de contact avec les animaux. Michel Saint-Jalme, l’actuel directeur du parc, raconte l'histoire des deux premiers éléphants arrivés en 1790 dans la Ménagerie. Après un long et rude périple, les deux pachydermes déprimaient dans cet environnement peu adapté à leurs besoins. Pour tenter de pallier à leur mélancolie, on avait alors fait appel à l’orchestre du conservatoire pour les divertir, et obtenu des résultats stupéfiants.

Dans la région de Naples des producteurs de mozzarella passent de la musique classique à leurs bufflonnes car cela améliore la qualité de leur lait.

Fanny Anderegg, compositrice, qui chante avec les dauphins en mer

Aujourd’hui dans le zoo parisien, on n'hésite plus à faire cohabiter des espèces différentes, et on peut désormais assister en direct à des dialogues aussi surprenants que ceux d'un petit tamarin vocalisant en face d’un grand cobaye. Il y a peu, on ne pouvait pas concevoir qu'un primate puisse souhaiter communiquer vocalement avec un rongeur.

Un tamarin de Panama. [Biosphoto/AFP - Ignacio Yufera]
Un tamarin de Panama. [Biosphoto/AFP - Ignacio Yufera]

Le dialecte des étourneaux

Michel Saint-Jalme évoque les étonnantes facultés d’apprentissage des étourneaux, capables de reproduire les sons les plus divers. Dans les campagnes, on peut les entendre imiter le bruit des moteurs de voiture ou des tronçonneuses. Plus ils développent leur capacité d’imitation, plus ils sont attractifs comme partenaire sexuel!

Ces imitations forment une sorte de dialecte que les étourneaux se transmettent de génération en génération.

Menacés pour la beauté de leurs chants

En Asie du sud-est, des milliers d'oiseaux chanteurs sont capturés illégalement chaque année pour la captivité ou l’exportation, mais aussi pour des concours de chants très populaires en Indonésie, à tel point que de nombreuses espèces sont en danger d'extinction. A l’instar de certaines grandes villes chinoises d’où les oiseaux ont disparu. Raison pour laquelle le Jardin des Plantes participe à la campagne Silent Forest, qui lutte pour que le forêts asiatiques ne soient pas condamnées au silence.

Une proposition d'Anne Gillot et David Christoffel

Réalisation web: Manon Pulver    

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