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A Montreux, Joan Baez adresse de touchants adieux à la scène

La chanteuse Joan Baez a fait ses adieux au Montreux Jazz Festival
La chanteuse Joan Baez a fait ses adieux au Montreux Jazz Festival / 12h45 / 1 min. / le 4 juillet 2019
La chanteuse américaine Joan Baez a fait ses adieux à Montreux et à la scène mercredi soir. A 78 ans, l'éternelle madone insoumise de la folk a perpétué ses nobles idéaux en revisitant le patrimoine musical dans un concert touchant mais redondant.

"Au revoir mes amis...". Ainsi Joan Baez prend-elle sobrement congé de son public tout acquis mercredi soir au Montreux Jazz Festival. Dans son "Fare Thee Well Tour" qu'elle a débuté l'an dernier dans le sillage d'un album de reprises, "Whistle Down the Wind", la chanteuse américaine adresse humblement et comblée, souriante plutôt qu'attristée, ses adieux à une scène qu'elle a foulée plus de cinquante ans durant.

Humaniste historique de la folk et de toutes les causes, (non-violence, droits civiques et de l‘homme), elle n'en porte aucun stigmate. Traits fins de douce grand-maman, voix toujours cristalline, Joan Baez force le respect sans avoir l'air d'y toucher, seule en scène ou sobrement épaulée par deux musiciens et une choriste. Dans l'auditorium Stravinski qui l'ovationne à maintes reprises, elle entame son concert seule à la guitare acoustique en rendant visite à Bob Dylan, son ancien compagnon, via "Don't Think Twice" et "Farewell Angelina", ainsi qu'à Tom Waits par l'entremise de "Last Leaf" et "Whistle Down the Wind", dont elle évoque principalement en français le propos, soit un jeune homme qui a peur de quitter son village.

Hors du temps et souvent au coeur de l'actualité

Blazer blanc à fines rayures sur T-shirt noir et jeans, éternel collier en tour de cou, Joan Baez, elle, n'a peur de rien depuis longtemps. Sa guitare et sa voix ont toujours été des étendards. Qu'elle dédie un texte a cappella à Barack Obama, se fende d'un hommage à Ingrid Betancourt, loue les vertus protectrices du seigneur, ravive un air de Woodstock ou un refrain militant en espagnol, John Baez a pourtant toujours distillé une grâce exquise. Hors du temps et souvent au coeur de l'actualité, l'Américaine impose un silence religieux. Difficile d'oublier la stature de cette dame-là, qui a assisté au "I Have a Dream" de Luther King à Washington, s'est rendue sous la mitraille au Vietnam ou Sarajevo et qui a défié la dictature de Franco en entonnant "No Pasarán". John Baez est une légende dont le message dépasse le folk.

A 78 ans, l'éternelle madone insoumise est venue perpétuer ses nobles idéaux à Montreux, en interprétant notamment "Deportees" de Woody Guthrie, chanson en hommage aux réfugiés et plus particulièrement ceux qui sont maltraités aux Etats-Unis, détaille-t-elle. Le titre de l'anarchiste américain Guthrie, inspirateur de Dylan et figure mythique des hobos, évoquant les travailleurs frontaliers mexicains. Simplement accompagnée d'un violon plutôt country et d'un tam tam, Joan Baez fait mouche.

Touchante malgré les redondances musicales

Avec "The President Sang Amazing Grace", elle a aussi choisi un titre d'une musicienne américaine peu connue, Zoe Mulford, revenant sur le massacre de paroissiens noirs sous les balles d'un partisan de la suprématie des Blancs à Charleston, en Caroline du Sud, en 2015 et sur le discours émouvant de Barack Obama qui avait chanté en hommage aux victimes.

Ailleurs, elle continue de s'immerger dans le patrimoine musical, en reprenant par exemple en fin de concert "Imagine" de John Lennon, "Suzanne" de Leonard Cohen, "The Boxer" de Paul Simon ou "Forever Young" de Dylan encore. Et en osant parfois un pas de côté, en revisitant par exemple "Another World" d'Antony and the Johnsons. A l'aise dans tous les registres, souvent touchante malgré les redondances musicales, la New Yorkaise a encore tenu sa prestation grâce à sa stupéfiante force tranquille.

Olivier Horner

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