Il convoque "l'esprit adolescent", le "Ghosteen". A savoir celui de son défunt fils Arthur, tombé tragiquement voilà quatre ans d'une falaise de Brigthon, et dont le souvenir hantait déjà le sublime "Skeleton Tree" publié l'année suivante par Nick Cave aux côtés de ses Bad Seeds.
Le travail de deuil se perpétue sur ce dix-septième album du chanteur australien, 62 ans, qui prend des formes musicales rock de plus en plus lancinantes et atmosphériques. En onze chansons au désespoir aussi sublimé que dépassé, comme autant de quêtes méditatives, Nick Cave privilégie les supplications plutôt que les prêches habituels.
Grave et splendide, lacrymal et gracieux, "Ghosteen" déploie ses fatales noirceurs à travers un diptyque où un premier tableau de huit titres représente "Les Enfants" et un second en trois grands volets plus parlé que chanté représente "Les parents". "I've been waiting for your return", implore rapidement Nick Cave dans le premier volet béant de chagrin.
Catharsis d'un chemin de croix
Sur une partition pleine de synthétiseurs, d'orgues et de choeurs féminins, plus avare en guitares électriques et piano, entre gospel et requiem électro, l'ex-Birthday Party convoque Dieu, la foi ou les Enfers pour mieux conjurer un sort qu'il semble désormais davantage appréhender sur le registre empathique plutôt que désespéré.
Un ressenti plus apaisé qui culmine sur l'épilogue intitulé "Hollywood", où la voix grave tutoie des hauteurs aigües insoupçonnées pour lâcher "J'attends que vienne la paix/C’est si long de trouver la paix de l’esprit". "Ghosteen" aura été la catharsis de son chemin de croix. L'oeuvre au noir d'un abîme concret enfin transcendé.
Olivier Horner