Inventeur et grand maître incontesté du dub, King Tubby s'est fait assassiner devant chez lui, en Jamaïque, le 6 février 1989. Avant cela, il avait lancé la révolution dub depuis la chambre de sa mère dans un ghetto misérable de Kingston.
Son héritage musical inouï reste toutefois méconnu. La biographie de Thibault Ehrengardt, "King Tubbys, The Dub Master", réalisée en accord avec sa famille, retrace le parcours exceptionnel de cet homme qui a révolutionné la pop sans jamais quitter la Jamaïque. Précurseur des musiques électroniques, il a redéfini la musique depuis son petit bungalow perdu au fond du ghetto de Waterhouse, à Kingston.
"Ingénieur, autodidacte, King Tubby s'intéresse très tôt à l'électronique. Il récupère d'abord des matériaux dans des décharges pour construire ses propres transistors. Adolescent, il s'implique rapidement dans le son, monte des sound system et s'intéresse peu à peu au travail de studio jusqu'à inventer le dub", explique Thibault Ehrengardt à la RTS.
Quand on évoque le dub, on parle d'un morceau instrumental sur lequel est trafiqué chaque instrument, par des échos, des réverbérations. Processus de déconstruction et reconstruction sonore, le dub connaîtra son âge d'or dans les années 1970.
Effets de réverbération originaux
Professionnel dès 1968, au côté du DJ U Roy, King Tubby peaufine son art dans le studio qu'il a emménagé dans la chambre de sa mère, où il enregistre les voix et mixe ses sons. C'est sa console qui donnera la couleur particulière des morceaux dub qu'il enregistre et qui constituent les faces B des 45 tours de reggae de l'époque.
King Tubby va alors commencer à graver ses dubplates en nombre, expérimentant et popularisant la plupart de ses effets de réverbération qui définissent encore le style aujourd'hui. Il les teste ensuite en live lors des soirées dansantes qu'il organise avec son sound system baptisé King Tubby's Home Town Hi Fi sur une sono et console qu'il a confectionnées lui-même.
Personnage parmi les plus importants du reggae avec Bob Marley, Peter Tosh et Lee Scratch Perry, King Tubby a vite endossé en Jamaïque le statut de légende quand bien même il ne donnait quasi aucune interview et a été très peu médiatisé.
Interview: Ellen Ichters
Texte et adaptation web: Olivier Horner
Thibault Ehrengarrdt, "King Tubbys, The Dub Master" (Natty Dread, 2019).