Une nuée de parapluies, K-Way et autres pèlerines multicolores se déploient devant une tente qui accueille le quartet d'Erik Truffaz alors que le reste des spectateurs se masse sous les différents abris entourant la petite scène. Mercredi soir à Sion, dans les jardins de la Préfecture à l'anglaise nichés au coeur de la ville à l'enseigne du Palp Festival, la pluie abondante a d'abord raison de l'installation électrique qui coupe la chique du trompettiste et ses musiciens.
Malgré ce faux départ qui gâche le plaisir du premier concert post-confinement du quartet que forme Truffaz avec Marcello Giuliani (basse), Benoît Corboz (claviers) et Arthur Hnatek (batterie), la formation fait abstraction du couac et s'épanouit rapidement en déployant ses atmosphères mystiques ou pop de "Lune Rouge", un 19e album paru en octobre dernier où le jazz se frotte encore à l'électronique, au hip-hop, au dubstep ou à des motifs orientaux.
Un jazzman pop
En décoration de scène, des découpes de pavillons cuivrés de trompettes ou de cymbales tenus par des néons filandreux jaunes évoquent la dimension cosmologique des nouvelles compositions de Truffaz, imaginées par le jeune batteur genevois de 30 ans Arthur Hnatek. Sans qui rien ne serrait arrivé, se plaît d'ailleurs à rappeler le souffleur durant le concert qui ne durera finalement qu'une heure et quinze minutes au lieu de une heure quarante-cinq initialement rêvé en raison du mauvais alignement des astres ce soir-là.
Dense et exclamatif, délié et suspendu, le répertoire du jazzman le plus pop semble constamment baigné d'une lumière ocre et d'une limpidité à toute épreuve malgré les forces telluriques qui traversent les compositions aux sons sans cesse transformés par des effets électroniques.
En creusant encore les mêmes sillons hybrides et frottements stylistiques, à l'ombre de l'acid jazz ou de Miles Davis, Truffaz parvient à en dégager de splendides clairs-obscurs avec une bonne dose de synthétiseurs inédits et de groove imparable.
Olivier Horner