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Rétrospective: le meilleur du jazz et des musiques du monde en 2020

Le musicien, auteur-compositeur-interprète et acteur argentin Daniel Melingo. [facebook.com/danielmelingo - Alfredo Srur]
Le musicien, auteur-compositeur-interprète et acteur argentin Daniel Melingo. - [facebook.com/danielmelingo - Alfredo Srur]
Cent fois sur le métier, tu réviseras l'ouvrage! En 2020, le jazz et les musiques du monde ont fait du neuf revigorant avec les styles et les modes du vieux. Et même ciblé de nouvelles trajectoires. Le choix de l'équipe de l'émission "L'Echo des pavanes".

Sarah Lancman, "Parisienne" (Jazz Eleven)

Intemporel, et c'est un compliment. Sur "Parisienne", Sarah Lancman écrit des chansons originales qu'on croirait déjà consignées dans l'histoire du jazz vocal ("Et ainsi va la vie", "C'était pour toi"). Le grave échauffant de sa voix, un chic juste ce qu'il faut de désabusé dans la diction font le reste. Et c'est sans compter l'accompagnement tiré à quatre épingles d'un trio mené par le piano de Giovanni Mirabassi. N'en jetez plus?

Et pourtant. Pour la photo-finish, la chanteuse se paie le luxe de catapulter dans la stratosphère sa réinvention de "L'hymne à l'amour" d'Edith Piaf. Frissons – admiratifs – garantis. BPR

Christian Scott aTunde Adjuah, "Axiom" (Ropeadope)

Une énergie folle, mais parfaitement maîtrisée, une qualité d'écoute évidente, un vrai sens du partage, des arrangements lumineux aux développements passionnants qui donnent de la place à chacun des musiciens…

Enregistré au Blue Note, à New York, entre le 10 et le 15 mars 2020, au moment où le monde commence à se confiner pour faire face à la pandémie de Covid-19, cet album live du trompettiste de la Nouvelle-Orléans est un hymne à la vie et au partage. Au-delà des codes, il plonge aux racines créoles d'un jazz résolument décolonisé et jubilatoire. VZI

>> A écouter, "Axiom, le djembé et le jazz, le début d'une nouvelle relation", une chronique de "L'Echo des pavanes" :

Christian Scott le 10 février 2019 à Los Angeles. [Getty Images via AFP - Neilson Barnard]Getty Images via AFP - Neilson Barnard
Axiom, le djembé et le jazz, le début dʹune nouvelle relation / L'Echo des Pavanes / 17 min. / le 26 novembre 2020

Melingo, "Oasis" (Buda Musique)

Cet homme est une fiction. Il est devenu personnage, clochard céleste, bateleur d’estrade. Melingo l'Argentin, diablotin portègne, voix de papier de verre et clarinette de charmeur de serpent. Il chaparde sans complexe dans les poulaillers musicaux les plus divers: tango, chanson canaille, rebetiko, blues des trottoirs, complaintes brechtiennes, rock psychédélique ou envolées napolitaines. On aurait dû croiser Melingo cette année dans le sillage de son nouvel album, hélas un confinement strict l'a cadenassé à Buenos Aires. Ce n’est que partie remise! TSI

Always Know Monk, "HUMPH" (Association Puzzle)

Le contrebassiste Yves Marcotte rassemble pour la deuxième fois Always Know Monk afin de poursuivre ses explorations et arrangements de la musique de Thelonious Monk. Au départ, il y a le trio Kolmoset avec le batteur Nathan Vandenbulcke et le saxophoniste Zacharie Canut. Les trois Français co-louent le gîte pendant leurs études à la HEMU de Lausanne. Musique "at home", complicité, amitié!

Puis commence Always Know Monk avec, en plus, le trompettiste Shems Bendali. Un premier disque reçoit bonnes critiques et voici "HUMPH" pour le compléter. Même pertinence, plus quelques solistes invités: le tromboniste Nils Wogram ou, au saxophone, Christophe Monniot. Always Know Monk ajoute à la musique de Monk une très belle pierre, enfin deux. A suivre absolument, très convaincant. IME

Rizan Saïd, "Saz Û Dilan" (Akuphone)

Un mage du synthétiseur oriental. On doit à ce Kurde de Syrie l'imparable folie dansante des disques de l'ambianceur de mariage Omar Souleyman dont les productions triomphent à l'international. Emancipé de son patron à lunettes noires et désormais exilé en Europe, Rizan Saïd livre des disques en solo qui repoussent les limites des claviers orientaux et ouvrent la porte des discothèques occidentales aux musiques actuelles du monde arabe. TSI

>> A écouter, "Le synthétiseur des 1001 nuits", une chronique de "L'Echo des pavanes" :

La pochette de l'album "Maghreb K7 Club". [Bongo-Joe]Bongo-Joe
Le synthétiseur des 1001 nuits / L'Echo des Pavanes / 16 min. / le 30 mars 2020

Jean-Louis Matinier & Kevin Seddiki, "Rivages" (ECM Records)

Dialogue intimiste et profond de deux musiciens rompus à la fois aux exigences du solo et de l'accompagnement. Tous deux ont brillé avec les plus grands, mais ici, aucune virtuosité inutile, juste l’essentiel, magnifié par une prise de son digne des plus belles réalisations d'ECM et qui met en valeur comme jamais la guitare de Kevin Seddiki.

Entre musiques classique ou contemporaine et jazz lyrique ou modal, la rencontre de ces deux-là puise à l'eau des musiques du monde et de la chanson, avec intelligence et sensibilité. VZI

>> A écouter, "Matinier/Seddiki: décors avec guitare et accordéon", une chronique de l'émission "L'Echo des pavanes" :

Kevin Seddiki (guitare) et Jean-Louis Matinier (accordéon) sortent leur premier album intitulé "Rivages". [facebook.com/Jean-Louis-Matinier-Kevin-Seddiki - DR]facebook.com/Jean-Louis-Matinier-Kevin-Seddiki - DR
Matinier/Seddiki: décors avec guitare et accordéon / L'Echo des Pavanes / 32 min. / le 22 juin 2020

Multiquarium Big Band, "Remembering Jaco" (Naïve Jazz)

Lorsque le "meilleur bassiste électrique du monde" Jaco Pastorius débarque sur Terre (1951), il dessine un héritage magistral jusqu'à sa mort (1987). Pour la guitare, il y eut aussi Biréli Lagrène. Aujourd'hui, ajoutez à ce dernier le Multiquarium Big Band des deux passionnés André Charlier et Benoît Sourisse, plus les arrangements de Stéphane Guillaume et la pépite résultante qui vous fera vibrer comme le fit Jaco lui-même.

Magie? C'est que tout ce petit monde franco-belge aime Jaco Pastorius, son intelligence musicale, ses compositions. Et que Biréli Lagrène est même d’accord de poser sa guitare pour révéler son monde secret: la guitare basse. Il ne sera pas Jaco Pastorius mais bien lui-même, nous faisant penser au maître pour les mêmes raisons. Ainsi va "Remembering Jaco". Quelle réussite. IME

Benoît Perrier, Vincent Zanetti, Thierry Sartoretti, Ivor Malherbe/aq

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