Beethoven meurt en 1827 sans avoir pu achever sa 10e symphonie. Près de deux siècles plus tard, une création romande propose de prolonger l'œuvre du célèbre compositeur grâce à l'intelligence artificielle.
Un défi que s'est lancé le chef d'orchestre Guillaume Berney et Florian Colombo, ingénieur en intelligence artificielle. Le tout sera interprété par l'orchestre Nexus, composé de jeunes musiciens professionnels de Suisse romande, à l'occasion du 10e anniversaire de la formation.
D'une durée de sept minutes, le morceau sera créé le matin même du concert par un programme qui a appris à connaître le compositeur en "digérant" l'œuvre des 16 quatuors à cordes de Beethoven. Les esquisses de la 10e symphonie, laissées lors de la mort de Beethoven, seront ajoutées dans l'ordinateur qui, via des algorithmes, générera une nouvelle partition.
"Les chefs d'orchestre classiques sommes plutôt des interprètes, nous ne créons pas tellement. Je trouvais que c'était une bonne manière de participer à une création sans la composer. Le processus global me plaît, le fait de tout faire sur une journée m'intéresse vraiment. Il faut voir cela plutôt comme un happening, un concept global plutôt qu'un résultat", explique Guillaume Berney.
Algorithmes d'apprentissage
Le programmeur et chercheur à l'EPFL Florian Colombo a appelé son algorithme BeethovANN, ANN étant l'acronyme anglais de "réseau de neurones artificiels". Un modèle statistique inspiré des neurosciences, entraîné à apprendre le style musical du compositeur à partir de ses œuvres.
"Je demande au premier violon de jouer la mélodie esquissée par Beethoven pour la 10e symphonie. Les réseaux du programme vont ingérer la mélodie et vont composer le morceau en fonction de ce que la machine a appris. En l'occurrence ici les quatuors à cordes du compositeur."
Progrès constant
Pour Laurent Pugin, musicologue, informaticien et codirecteur du Répertoire International des Sources Musicales (RISM), faire appel à l'intelligence artificielle pour cette symphonie inachevée n'est pas une idée si incongrue.
"Il y a vraiment des progrès constants dans le domaine. Il est donc possible, en entraînant des algorithmes d'apprentissage, de générer ensuite une œuvre qui serait peut-être dans la lignée de ce qu'a imaginé Beethoven", avait-il expliqué lors d'un interview pour la RTS en 2020."Mais cela donnera-t-il vraiment lieu à la symphonie telle que l'a imaginée le compositeur ? C'est une question qui reste complètement ouverte. C'est toujours difficile de savoir quelle est la partie humaine qui est là derrière."
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D'autres projets semblables ont été lancés ces dernières années. A l'instar de celui du géant chinois des télécoms Huawei, qui a présenté en 2019 une version terminée de la symphonie inachevée de Schubert.
Cette 10e symphonie inédite sera jouée gratuitement le 2 et 3 septembre au Métropole de Lausanne et au Victoria Hall de Genève.
Sujet TV: Aurélie Coulon
saje/ats