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Flèche Love s'avère aussi scientifique que métaphysique dans "Naga, Pt. II"

Flèche Love sur la scène du Montreux Jazz Lab durant la 52e édition du Montreux Jazz Festival, le 13 juillet 2018.
Jean-Christophe Bott
Keystone [Keystone - Jean-Christophe Bott]
L'invitée: Flèche Love, "Naga, Pt.2" / Vertigo / 22 min. / le 27 octobre 2021
La chanteuse romande publie son album "Naga, Pt. II", deux ans après le premier volet. Flèche Love est en concert acoustique ce jeudi soir au Musée d’ethnographie de Genève, puis sera en tournée en novembre en Suisse romande.

Dans "Naga, Pt. II", Amina Cadelli de son vrai nom chante de manière décomplexée tandis que le studio est plongé dans le noir. Elle revient sur les éléments qui ont inspiré sont disque, parfois scientifiques et parfois métaphysiques.

Ethnologie et vie d’artiste

L’ethnologie, sujet que la chanteuse suisso-algérienne connaît bien, influence beaucoup son travail artistique, comme elle l'indique à la RTS: "Avant de poursuivre ma carrière musicale à plein temps, j’avais commencé un Bachelor en Ethnologie à l’Université de Neuchâtel, et en Histoire et science des religions à Lausanne. Je ne l’ai pas terminé, parce que j’étais tout à coup emportée par le succès de ma musique. Je donnais beaucoup de concerts, et j’ai dû choisir entre une carrière académique et une carrière musicale."

Quand je lis un livre scientifique, je tombe parfois sur des anecdotes qui me paraissent tellement incroyables que je les partage en musique!

Flèche Love

Flèche Love continue tout de même à étudier et à lire des livres sur l’ethnologie, mais pas que: les sciences en général fascinent et inspirent la chanteuse. "C’est étrange, mais je n’écoute pas beaucoup de musique. En revanche, je lis beaucoup. C’est plutôt de ces lectures que partent mes morceaux. Par exemple pour mon précédent album, 'Naga, Pt. 1', j’avais lu un livre sur les parasites d’Olivier Hertel et Christine Coustau. Le ver dicrocoelium dendriticum, qui parasite plusieurs animaux, a inspiré mon rap."

"Enceladus", de la maternité à l’espace

L'artiste continue à puiser dans la science et la nature pour écrire "Naga, Pt. II". La pierre de protection shungite, le satellite de saturne Encelade ou encore le papillon acherontia atropos (sphinx tête de mort) lui inspirent plusieurs titres.

L’histoire de la chanson "Enceladus" commence avec un questionnement de la chanteuse sur les vies antérieures. "Je suis tombée sur un colloque de scientifiques qui expliquait que l’hormone de l’ocytocine, lorsqu’elle est présente dans le liquide amniotique dans le ventre de nos mères, a deux rôles: le premier est de créer du lien affectif, et le second est l’amnésie! J’ai trouvé cela complètement fou, et j’ai commencé à écrire ‘Enceladus’".

"Mitote", une quête pour la rencontre de soi

Pour Flèche Love, ce nouvel album possède un aspect plus spirituel et métaphysique que son prédécesseur. La première chanson du disque, "Mitote", est écrite à la suite nombreux éléments convergents qui frappent l’artiste dans ses lectures. À l’origine, le Mitote est une danse commune aux Mayas et aux Aztèques qui se rapproche d’une transe. Il est aussi évoqué dans "Les quatre accords toltèques" de Don Miguel Ruiz, philosophie destinée à se libérer des souffrances inutiles, de manière conceptuelle. "Les réalisatrices de 'Matrix' se sont également inspirées du Mitote, qui est comme un voile entre nous et la réalité, ce rêve éveillé que nous partageons toutes et tous", explique la chanteuse.

Interprétée en espagnol par Flèche Love, les paroles de "Mitote", peuvent être traduites ainsi: ‘Les murs de ta peau se décomposent petit à petit, le vent te débarrasse de l’inutile, bientôt tu seras de retour et je serai à tes côtés mon amour.’ "Pour se trouver soi-même, il faut aussi pouvoir s’effacer, se mettre à nu", estime la parolière.

Des chansons pour répondre aux questions métaphysiques

Quant au titre "Acherontia Atropos", il parle d’une situation particulière, la rencontre de personnes "que nous avons l'impression d’avoir connues dans de nombreuses vies, mais où il ne s’est jamais rien passé. Et là, tout à coup, il se passe quelque chose et l’on sent qu’en étant avec cette personne, on transporte des milliers de vies."

Une artiste à contre-courant

Tandis que les maisons de disques réfléchissent de plus en plus en termes d’algorithmes lorsqu’il s’agit de compositions, Flèche Love choisit d’aller à contre-courant, en ne composant pas en termes de compatibilité radio et en pratiquant l’écriture automatique.

Mes chansons ne riment pas du tout, mes couplets n’ont jamais la même mélodie. Ce sont des essais, des choses qui me traversent!

Flèche Love

"J’ai travaillé avec des personnes obsédées par cela. J’ai besoin d’être libre dans ma créativité, esthétiquement et musicalement, affirme Flèche Love. Je comprends cependant les artistes qui ont besoin d’être orientés, ou qui prennent du plaisir à faire de la musique commerciale. Je pense par exemple au producteur suédois Max Martin, qui a gagné de nombreux Grammy's. Personnellement, je pense que si je travaillais en essayant de créer un tube, cela polluerait ma créativité."

Propos recueillis par Pierre Philippe Cadert

Adaptation web: Myriam Semaani

Flèche Love, "Naga, Pt. II" (PIAS)

Flèche Love en concert au Musée d’ethnographie de Genève, je 28 octobre à 20h, pour une création acoustique, SAS, Delémont, le 6 novembre; Usine à Gaz, Nyon, le 12 novembre et Nouveau Monde, Fribourg, le 20 novembre.

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