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Hommage à Serge Wintsch, trompettiste et passeur passionné

Serge Wintsch [RTS - Alexandre Chatton]
Hommage musical à Serge Wintsch, trompettiste naturel et passeur passionné / JazzZZ / 55 min. / le 21 janvier 2022
Le Lausannois Serge Wintsch, trompettiste de talent, architecte et fondateur du festival JazzOnze+ avec son épouse Francine en 1986, est décédé le 11 janvier dernier. Passionné de bebop dès son adolescence, il a grandement contribué au développement de la scène jazz vaudoise.

Né à Lausanne en 1936 d’une mère d’origine mauricienne, c’est lors de son adolescence dans les années 1950 que Serge Wintsch se passionne pour la musique jazz, notamment le bebop et plus tard le hard bop. Ces deux courants, révolutionnaires à l’époque, sont nés de la volonté des musiciens afro-américains de se libérer de la discipline des orchestres, où les musiciens sont très nombreux (les big bands), tout en laissant plus de place à l’improvisation et à leurs origines africaines dans les compositions, dans des formations réduites. Parmi les musiciens influents de ces courants, le trompettiste Clifford Brown, dont le jeune Serge est fan. Sa mort en 1956 le laisse pantelant.

Révolution jazz à Lausanne

C’est aussi à cette époque que Serge Wintsch commence à jouer dans les clubs lausannois. L’un des musiciens de jazz les plus appréciés est alors Sidney Bechet, avec ses compositions populaires et accessibles comme "Les oignons", "Dans les rues d’Antibes", "Marchand de poisson" ou encore son populaire "Petite fleur". Il est donc de bon ton de jouer ces morceaux dans les clubs.

Lorsqu’un musicien joue du hard bop ou du bebop dans un club lausannois, comme par exemple les morceaux de Clifford Brown "Joy Spring", "Daahoud" et "Jordu", il prend donc le risque de se faire jeter dehors par le patron et/ou le public, qui ne sont pas encore réceptifs à cette musique. Le jeune Serge décide d’en faire malgré tout qu'à sa tête. Ses amis le surnomment Howard, en référence au prénom d'Howard McGhee, trompettiste au carrefour entre le bebop et le jazz classique.

>>À écouter: Serge Wintsch et le Big Band de Lausanne interprètent "I Remember Clifford" de Benny Golson, dans la salle Padarewski du Casino de Montbenon, le 4 décembre 1987:

Serge Wintsch [RTS - Alexandre Chatton]RTS - Alexandre Chatton
Serge Wintsch et le Big Band de Lausanne, "I Remember Clifford" (B. Golson) / JazzZZ / 6 min. / le 21 janvier 2022

En 1986, Serge Wintsch fonde, avec son épouse, le festival JazzOnze+. Lausanne n'est pas prête de s'arrêter de jazzer: des musiciens de renommée internationale comme Marcus Miller et Charles Lloyd visitent la capitale vaudoise, qui lance également de jeunes talents locaux et internationaux.

La jazz attitude incarnée

Michel Thévoz, ami d’enfance de Serge Wintsch, lui rend hommage pour la RTS: "C’est la passion du jazz qui nous a tout de suite liés, à une époque où le jazz était beaucoup plus que du jazz. C’était une autre manière de vivre, c’était le chant annonciateur d’une révolution à laquelle nous croyions, non pas naïvement, mais raisonnablement. […] Nous étions épris de la culture noire, ressentions fortement qu’Armstrong, Charlie Parker, Thelonious Monk ouvraient une ère nouvelle. C’est un fait: ils ont modifié le paysage musical et la sensibilité collective dans le monde. […] Je dois beaucoup à Serge, nous sommes beaucoup à lui devoir beaucoup. […] On ne doit pas trop se chagriner de son départ: il est mort de son vivant. Sans s'attarder, il a gardé le tempo, sans allonger le chorus, c’est dans son style. La jazz attitude incarnée."

Sujet radio: Yvan Ischer

Adaptation web: Myriam Semaani

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