LES CHOIX D'OLIVIER HORNER
Dominique A, "Le monde réel"
Après avoir publié le minimaliste "Vie étrange" entre deux confinements, Dominique A revient avec le maximaliste "Monde réel". Un quatorzième album subtilement orchestré conçu de manière collective durant près d’un mois au prestigieux studio-manoir de La Frette, non loin de Paris, et qui laisse beaucoup de place à la voix lyrique du Nantais. Les dix titres impressionnent surtout par leur pouvoir évocateur. Ils comportent beaucoup de références à la nature, avec un lexique des plus organiques, en parallèle à des récits plus intimes et introspectifs - notamment autour de souvenirs d’enfance.
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Rosalía, "Motomami"
Du flamenco le plus pur aux beats tonitruants sur fond de reggaeton, c'est l'esprit du duende, un démon métaphorique hispanique, qui plane et transfigure "Motomami" de Rosalía en une expérience presque mystique. Se jouant des codes et des chapelles musicales, la chanteuse espagnole pousse sur son troisième les hybridations à l'extrême pour une pop à la fois hospitalière et expérimentale qui embrasse jazz, hip-hop, electro ou rock dans un même élan novateur.
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Honey For Petzi, "Observations + Descriptions"
Onze ans après leur dernier album, les Lausannois de Honey For Petzi sont de retour avec "Observations + Descriptions". Un répertoire au format plus pop et interprété en français qui délaisse les compositions post-rock grâce auxquelles le trio s'était distingué. Douze morceaux pleins de méandres, parfois rythmiquement labyrinthiques, qui apparaissent comme autant d’échappées belles. Honey For Petzi trouve ici un nouveau souffle dans un registre plus mélodique qui ne laisse pas tomber les décharges furieuses pour autant.
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Fontaines D.C., "Skinty Fia"
Plus sombre, tourmenté, mélancolique qu’électrique et effréné comme habituellement, ce troisième album charrie une noirceur inédite chez Fontaines D.C. Le quintet de Dublin évoque la question de l’identité irlandaise, des discriminations sur le sol anglais, d’addictions, de relations humaines et amoureuses avec une rage plus rentrée et des tempos ralentis désormais. Les instrumentations prennent ici de l’ampleur et le chant du Grian Chatten se fait plus imposant et intense au cœur des ambiances ténébreuses de ces dix nouveaux morceaux qui affirment une urgence différente.
Wet Leg, "Wet Leg"
Porté par "Chaise Longue" (2021), titre punk-pop abrasif et viral vantant les délices du farniente, les Wet Leg ont affolé la planète rock. Le groupe formé par un noyau dur féminin (Hester Chambers et Rhian Teasdale) natif de l’Ile de Wight s'est affiché en digne héritier des Runaways ou des Breeders. Avec plus loin les Pixies et Nirvana veillant au grain rythmique. Si les autres morceaux de leur premier album éponyme se sont avérés moins lascivement agressifs, le répertoire affiche une parfaite tenue. Entre ardeur et candeur, fulgurances pop mélodiques et saturations post-punk, nonchalance et urgence, ces douze titres plein de doubles sens érotiques s’avèrent d’une revigorante fraîcheur.
LES CHOIX D'YVES ZAHNO
Pete Doherty & Frédéric Lo, "The Fantasy Life of Poetry & Crime"
"The Fantasy Life of Poetry & Crime" incarne un mariage admirablement réussi entre l’élégance pop signée Frédéric Lo et la poésie délicate de Pete Doherty. Une alchimie qui séduit tout au long de ces douze chansons enregistrées durant la pandémie dans un manoir d’Etretat. En émane une véritable "mélancolie lumineuse" comme le dit Frédéric Lo, ancien complice du "Crève-cœur" qui avait contribué en son temps à la renaissance du chanteur français Daniel Darc. Un répertoire sépia rempli de nuances, de pleins et déliés, qui correspond aux tourments et à la rédemption vécus par l'Anglais Pete Doherty.
Buddy Guy, "The Blues Don't Lie"
Buddy Guy, 86 ans, opère son retour en fanfare avec son 34e album studio. En une heure et seize titres, le guitariste américain fait ce qui lui plaît et prouve à nouveau toute son habileté dans un genre électrifié où il aime à chanter à la façon d'un prêcheur en transe. "The Blues Don't Lie" compte aussi quelques invités de marque, dont Mavis Staple, Elvis Costello et James Taylor.
Danger Mouse & Black Thought, "Cheat Codes"
Les rimes malignes ou militantes de Black Thought et les échantillonnages soul, funk et pop-rock psychédéliques de Danger Mouse font merveille sur cet album qui a mis presque vingt ans à voir le jour.
Nino Rota, "La Dolce Vita" (bande originale restaurée)
L'un des jalons intemporels du cinéma italien, réalisé par Federico Fellini et dont la musique est signée Nino Rota, retrouve un éclat inédit dans une version restaurée où se distingue notamment la version vocale du thème principal interprétée par la délicieuse voix de Katyna Ranieri, épouse du compositeur Riz Ortolani.
Compilation "Ghost Riders" (sur le label Efficient Space)
Le label australien Efficient Space, spécialiste des rééditions et compilations, explore la mélancolie sonore de quelques groupes et artistes américains issus des années 1960 et de la scène garage, dont The Yardleys. Une splendeur.
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