Avant de décéder dans un accident de voiture à l'âge de 36 ans seulement, Mani Matter s'est imposé avec ses textes engagés, en bärndutsch. Des chansons en dialecte devenues très populaires, qui sont même aujourd'hui enseignées à l'école et rejouées chaque été dans un festival portant son nom.
"Hemmige", chanson sortie en 1970 et grand succès du Bernois repris par Stephan Eicher en 1992, évoque ce caractère suisse répandu de retenue. Mani Matter avait lu que l'inhibition avait mené aux plus grandes réalisations culturelles de l'humanité.
Traduire Mani Matter est très difficile, tant il y a de jeux de mots et d'allusions, de l'ironie, de l'humour. Mais ses chansons décrivent finement la Suisse des années 1960-70.
Inspirations dans sa vie professionnelle
Son regard affûté sur le monde, Mani Matter le doit aussi à Georges Brassens, dont il était un grand admirateur. Mani Matter a fait ses début à la fin des années 1950 en essayant de traduire les chansons du poète sétois. L'expérience n'est pas jugée concluante et Mani Matter se met à écrire ses propres textes en dialecte bernois en s'accompagnant de sa guitare. Le succès est au rendez-vous.
Dans "I han es Zündhölzli azündt", chanson absurde, il décrit par exemple la destruction possible du monde à partir du craquage d'une allumette qui tombe accidentellement sur le tapis.
Mani Matter, qui était aussi consultant juridique de la ville de Berne, trouve également dans sa vie professionnelle de nombreuses sources d'inspiration musicales. Notamment avec "Dynamit", l'histoire d'un citoyen qui déjoue un attentat au Palais fédéral. Il décrit la beauté de la démocratie suisse au terroriste qui, ému aux larmes, renonce. Mais ce héros-citoyen se demande après coup, si tout est si beau que ça et s'il ne s'est pas trompé.
Le troubadour de la chanson bernoise critique aussi la richesse de la Suisse et son avarice envers les plus pauvres. Dans "Dene Wos Guet Geit", il chante ainsi que ceux qui ont plus iraient mieux si ceux qui ont moins avaient un peu plus. Mais cela n'est pas possible sans que ceux qui ont plus en aient un peu moins...
Sujet radio: Yves Zahno
Adaptation web: olhor