"Je vais certainement déménager ici, il y a plein de mecs mignons". Fidèle à l'affirmation de son homosexualité, celui qui pourfend le racisme à coup de textes et clips sulfureux qui choquent l'Amérique puritaine, séduit et fait d'emblée sourire l'audience de l'Auditorium Stravinski à Montreux mardi soir. Depuis la veille, il a profité de la douceur des bords du Léman torse nu et partagé ses impressions avec sa large communauté sur Instagram et sait donc de quoi il parle.
A califourchon sur un grand cheval blanc
Lil Nas X vient là d'entamer sa courte mais énergique prestation par son manifeste queer "Montero (Call Me by Your Name)" en fourrure et en armure dorée de gladiateur, flanqué de ses huit éphèbes danseurs arborant tenues et bottes blanches à poils longs. On se dit alors que les choses commencent plutôt bien... Hélas, la suite du concert de la superstar de 24 ans des musiques urbaines aux milliards d'écoutes cumulées sur les plateformes de streaming se mue peu à peu en caricature à force de surjouer.
"Old Town Road", mariage sidérant de hip-hop, de country, de rock et de pop dans un décorum de Far West, aussi romanesque qu'en proie à la ségrégation entre Noirs et Blancs qui a révélé Lil Nas X, le voit donc ici entrer à califourchon sur un grand cheval blanc.
Humour et légèreté
La revue scénique façon crazy horse kitsch gay convoque ensuite tour à tour un ibis (pour "Sun Goes Down") et un Minotaure géant (sur "Lost in the Citadel") pour animer autant que meubler encore des chansons malheureusement souvent interprétées en play-back et que même Shazam reconnaît. Lil Nas X n'hésitant jamais à encore grossir les traits de ses fameux visuels controversés, jusqu'à embrasser l'un de ses danseurs.
Après "Don't Want It", une version condensée de "S&M", "Deja Vu" et "Sex Talk", puis "That's What I Want", délivrées dans des versions pop toujours très chorégraphiques, le monde de Lil Nas X se pare de bleu avec des spartiates en jupes et le mythique "Beat It" de Michael Jackson qui s'invite en introduction de "Industry Baby". Manière pour Lil Nas X de payer son tribut à ses inspirateurs. Un joyeux anniversaire entonné pour l'un de ses danseurs vient clore la parade trop courte qui aura néanmoins séduit voire galvanisé par moments l'audience.
Malgré son humour, sa légèreté et son insolence, on se dit au final que l'artiste qui a fait de son identité gay un étendard politique aurait tout de même pu faire valoir d'autres facettes plus inspirées de son anti-conformisme pour adapter sur scène son répertoire transgressif.
Olivier Horner