Une grille salariale pour payer correctement musiciennes et musiciens

Dans le milieu musical, la pandémie de coronavirus a généré un véritable tsunami social. Elle a mis en lumière le statut précaire des artistes et a rappelé que des artistes correctement payés sont aussi des artistes protégés par les assurances sociales en cas de difficulté.

A Genève, la Ville et le canton ont mandaté la Fédération genevoise des musiques de création (FGMC) pour établir des recommandations salariales. Diverses consultations et recherches ont été menées à titre de comparaison avec d'autres disciplines artistiques comme le théâtre ou d'autres genres musicaux, la musique classique notamment.

Rémunération à l'heure

En conclusion, la FGMC propose de rémunérer les musiciens et musiciennes en fonction des heures de travail effectuées. Par exemple, un concert isolé équivaut en moyenne à douze heures de travail comprenant l’ensemble des activités rendant cette prestation possible, notamment la balance audio, les déplacements et les tâches de préparation en amont.

En matière de coûts, la prestation de concert isolée (hors tournée) s’élève donc à 830 francs pour l’employeur, soit un salaire brut de 697 francs pour l’artiste. D'autres chiffres sont disponibles pour une tournée ou une séance d'enregistrement par exemple. Le salaire mensuel brut équivaudrait à 4'958 francs ou 5'900 francs d'honoraires si l'on est indépendant. Davantage selon son expérience, si l'on est leader du projet ou si l'on se produit en solo.

Un outil clé en main

En réalité, il est plutôt rare d'être employé au mois dans les musiques actuelles, le jazz ou la musique expérimentale. Des tarifs sont donc disponibles par semaine, jour ou heure. La grille est très concrète, fournie clé en main pour celles et ceux qui emploient ou programment des musiciens.

Pour les artistes, il s'agit d'un outil précieux. "Se considérer comme artiste et se sentir légitime à exercer ce métier passe aussi par une rémunération correcte. Le fait d'être peu ou pas rémunéré du tout pour son activité donne toujours l'impression que c'est un hobby, quelque chose que l'on fait en parallèle de notre vrai travail", explique à la RTS la chanteuse et compositrice Céline Frey.

Chiffrer la valeur du travail

Aujourd'hui, la réflexion ne fait que commencer. "Nous avons mis des chiffres sur la valeur du travail, maintenant il faut savoir comment financer cela. On s'entend dire qu'à l'heure actuelle, il est absolument impossible de financer ces recommandations avec les soutiens obtenus par les salles et les musiciens. Il y a une vraiment une volonté de tout le milieu de faire augmenter ces dotations de façon assez conséquente", indique Céline Frey.

En ce sens, la grille salariale constitue un outil crucial pour faire évoluer les discussions. "Nous allons pouvoir chiffrer, à offre égale, ce qu'elle coûterait avec ou sans la grille. C'est vraiment un processus que nous souhaitons mettre en route et accompagner avec les organisateurs de concerts qui ont un contrat de subventionnement avec la Ville de Genève", explique Jakob Graf, conseiller culturel pour les musiques actuelles au Service culturel de la Ville de Genève.

Au niveau national, l'Association suisse de musique Sonart devrait présenter aussi bientôt ses recommandations de rémunération pour les musiciennes et musiciens. Le Covid a fortement ébranlé le milieu et la problématique salariale est sur toutes les lèvres. Le débat est assuré de rebondir dans les mois qui viennent.

Sujet radio: Benoît Perrier

Adaptation web: mh