Cédric Klapisch: "Pour 'La flûte enchantée', j'ai dû changer ma manière de travailler"
Après avoir créé le personnage de Natacha, une danseuse de ballet dans "Poupées russes" (2005), réalisé un documentaire sur l'étoile Aurélie Dupont (2010) et consacré son dernier film en date au monde de la danse, "En corps" (2022), le réalisateur français Cédric Klapisch continue d'explorer les arts de la scène.
Mais cette fois, c'est dans le monde de l'opéra qu'il s'immisce, en signant pour la première fois la mise en scène d'une production. Et pas des moindres puisqu'il s'agit de la très célèbre "Flûte enchantée" d'Amadeus Mozart, donnée dès le 14 novembre au Théâtre des Champs-Elysées de Paris.
Attirer le grand public à l'opéra
Cédric Klapisch n'est pas le premier réalisateur de cinéma à franchir le pas. Avant lui, Michael Haneke, James Gray, Christophe Honoré ou encore Coline Serreau se sont essayés à l'exercice.
Avec des noms connus du 7e art sur leurs affiches, les maisons d'opéras voient une belle occasion de rajeunir leur image et espèrent attirer l'attention d'un public plus large. C'est également une manière d'offrir des mises en scène peut-être plus modernes ou novatrices, en tous les cas hors du carcan classique.
Sortir de sa zone de confort
Si l'on voit bien le but recherché par ces institutions, pourquoi se lancer dans une aventure qui peut s'avérer périlleuse, lorsque l'on est un réalisateur comme Cédric Klapisch avec trente ans de carrière dans le cinéma, quatorze longs métrages dont de nombreux succès et qui n'a, finalement, plus rien à prouver? "Lorsque l'on m'a proposé de mettre en scène 'La flûte enchantée' de Mozart à Paris, j'ai aimé l'idée de sortir de ma zone de confort", explique-t-il à la RTS.
Travailler avec des chanteurs ou des acteurs, ce n'est certes pas la même chose, mais il faut également tenir compte d'autres aspects, comme le fait que le spectacle est vu de loin. "Un peu comme pour le théâtre, à l'opéra, on est obligé de grossir le trait. On ne peut pas être dans le nuancé comme au cinéma où, avec un gros plan, on peut chercher le réalisme. Ici, on doit tout rendre spectaculaire. C'est un travail très différent, surtout de par cet aspect-là."
Travailler la gestuelle avant la psychologie
Pour sortir de ce réalisme, qui a toujours été au coeur de son cinéma, Cédric Klapisch a dû entièrement changer sa façon de travailler, ce qui a été une vraie motivation pour lui. Par exemple, il a commencé par réfléchir aux déplacements et à la façon de bouger des artistes sur scène. "C’est la première fois que je travaille la gestuelle avant de travailler la psychologie, indique-t-il. Je suis vraiment dans un autre univers et au service de la musique".
Par ailleurs le réalisateur a dû faire face à une autre nouveauté de taille: travailler avec des artistes qu'il n'avait pas choisis. "Les chanteurs ont été sélectionnés par le Théâtre des Champs-Elysées. Je n'ai découvert les chanteurs que lors de la première répétition. C'était nouveau pour moi de travailler avec des gens que je ne connaissais pas."
Faire résonner l'oeuvre avec l'actualité
Face à ce monstre sacré de l'opéra qu'est "La flûte enchantée" de Mozart , Cédric Klapisch a essayé "très sincèrement" de respecter l'oeuvre tout en la faisant résonner avec l'actualité. "C'est ce qui est intéressant avec les œuvres du patrimoine. De voir pourquoi elles sont éternelles, pourquoi elles font toujours écho avec le monde d'aujourd'hui. Pour moi, c'était cela le but".
Le réalisateur de "L'auberge espagnole" attend maintenant avec impatience le retour du public. Mais il sait déjà que quoi qu'il en soit, fort de cette première expérience dans le monde de l'opéra, il ne fera désormais "plus jamais des films de la même manière".
Propos recueillis par David Christoffel
Adaptation web: Andréanne Quartier-la-Tente
"La flûte enchantée", opéra de Mozart, mise en scène signée de Cédric Klapisch et direction d'orchestre de François-Xavier Roth. A voir au Théâtre des Champs-Elysées, Paris, du 14 au 24 novembre 2023.