A Antigel, Air ravive brillamment le rétrofuturisme de "Moon Safari"

Une scénographie qui rappelle un grand écran de cinéma, des éclairages évoquant "2001, l'odyssée de l'espace" de Kubrick et Air qui entre en scène tout de blanc revêtu comme souvent. Embarquement immédiat pour un aller simple sur la Lune sous le regard de deux yeux blancs aux pupilles en forme d'étoile rouge. Au Victoria Hall de Genève samedi soir en clôture de la 14e édition du Festival Antigel, les premières impressions que laissent le duo formé par Nicolas Godin et Jean-Benoît Dunckel, accompagné sur cette tournée du batteur Louis Delorme, sont éminemment cinématographiques, stellaires et ultra léchées.

Elles charrient une dimension presque irréelle, onirique aussi à l'image du voyage musical que propose leur premier album "Moon Safari" paru en 1998, qui a marqué son temps et traversé les époques grâce ses hybridations exquises entre orchestrations instrumentales et production électronique.

Les dix titres cultes de "Moon Safari"

Pour célébrer les vingt-cinq ans de la sortie de ces dix titres téléportés par le tube planétaire "Sexy Boy", l'emblématique duo de la French Touch s'est rôdé à Rouen lors d'une résidence ponctuée d'un premier concert privé le 16 février. C'est ainsi à Antigel et à guichets fermés que le duo versaillais a officiellement lancé sa tournée internationale qui passera notamment deux soirs par le Royal Albert Hall de Londres et par une nouvelle escale suisse au Montreux Jazz Festival le 15 juillet.

Des sept minutes introductives du fantastique et psychédélique "La femme d'argent" à l'épilogue constitué par "Le voyage de Pénélope", en passant par l'autre tube qu'est "Kelly Watch the Stars" et la richesse sonore de "New Star in the Sky (Chanson pour Solal)", Air réactive dans sa bulle luminescente scénique le rétrofuturisme d'un répertoire à la fois doux, profond, mélancolique et psychédélique qui n'a quasiment pas pris une ride.

La science mélodique de Air

Agrémenté de neuf autres titres aux visuels célestes, dont ce "Highschool Lover" figurant dans la B.O. du film "Virgin Suicides" de Sofia Coppola ou les plus rock "Venus" et "Surfing on a Rocket", ce concert narratif accentue encore davantage les airs atmosphériques lorgnant vers le 7e Art prisés par Air et délivrés entre claviers, synthétiseurs, basses, guitares, percussions, batterie électronique et voix robotisées.

Cette cohérence artistique, Air parvient à la déployer avec un sens, voire une science inouïe des détails, entre souffles mélodiques chaleureux, rythmiques polaires et motifs instrumentaux. Et quand en fin d'odyssée spatiale, Air accentue la vitesse et la puissance de croisière avec "Don't Be Light" et "Electronic Performers" avec quelques effets stroboscopiques, la Lune semble à portée de main. Le public est debout en tout cas, applaudissant à tout rompre sous les ors du Victoria Hall ses héros interstellaires d'un soir.

Olivier Horner