Modifié

Au Paléo, Patti Smith joue la rituelle prêtresse avec un quartet rock

La chanteuse américaine Patti Smith sur la Grande scène du Paléo Festival de Nyon, le 23 juillet 2024. [Paléo 2024 - Lionel Flusin]
La chanteuse américaine Patti Smith sur la Grande scène du Paléo Festival de Nyon, le 23 juillet 2024. - [Paléo 2024 - Lionel Flusin]
Mardi soir pour le premier concert sur la Grande scène de cette 47e édition du Paléo Festival de Nyon, l'emblématique chanteuse américaine Patti Smith, 77 ans, a rejoué les poétesses beatnik et prêtresses punk-rock tour à tour avec ferveur et modération.

La ferveur de "People Have the Power" en guise d'épilogue ritualisé depuis des années. Patti Smith, "marraine du punk" et marraine de coeur de nombreux festivals et festivaliers, ne déroge pas à chanter encore et encore cette note d'espoir parue en 1988 sur l'album "Dream of Life", poing levé, avec les choeurs du public de Paléo au diapason ardent.

Avant cela mardi soir en début de soirée sur la Grande scène qu'elle étrenne pour cette 47e édition du Festival, la poétesse et chanteuse américaine a revisité tranquillement ou plus énergiquement son répertoire, mais aussi ceux de Jimi Hendrix ("Fire"), Nirvana ("Smells Like Teen Spirit") et Lana Del Rey ("Summertime Sadness" dédié à Fred "Sonic" Smith, coauteur notamment de "People Have the Power" et père de son fils Jackson Smith qui l'accompagne à la guitare). Sans toutefois passer par "Gloria" pour une fois, foudroyante reprise de Van Morrisson en mode garage rock qui ouvrait son fondateur album "Horses" de 1975.

Langueurs et ardeurs rythmiques

Devant un public encore clairsemé en ce début de soirée, Patti Smith apparaît dans sa coolitude légendaire, jean retroussé sur baskets montantes blanches, veste et gilet noir habituels sur sa croix en collier et deux tresses grisonnantes. A ses côtés, un quartet resserré entre guitare-clavier, basse et batterie l'épaule pour cette heure et demie d'une prestation où elle entremêle les époques et générations, les langueurs et les ardeurs rythmiques.

L'ex-prêtresse de l'underground est ravie d'être de retour au Paléo et embraie avec "Summer Cannibals" puis une douzaine de titres qui passent notamment par un "Ghost Dance" dédié au travail des humanitaires de par le monde, fidèle à son humanisme. Plus loin, elle déclame un peu de poésie en introduction de "Nine" qui se déploie tout en langueur mélancolique et chamanique.

Si "Summertime Sadness" permet enfin paradoxalement au public de sortir de sa torpeur par son crescendo rythmique, c'est évidemment "Because the Night" co-écrit avec Springsteen et soulignant l'importance de l'amour qui crée les premiers émois, même si le public était plutôt attentif.

Humanisme et harangues

Ce sursaut est hélas suivi par une dispensable reprise rock'n'roll du "Fire" de Jimi Hendrix Experience sans Patti Smith qui ne fait pas tellement sens dans le répertoire choisi de la soirée. Heureusement que "Dancing Barefoot" et "Pissing in a River" mieux inspirés orchestralement viennent rattraper les affaires d'une Patti Smith qui a décidé de conclure par un double hommage à Kurt Cobain entre autres en interprétant un très solennel et incantatoire "About a Boy" de sa composition et en reprenant l'incunable qu'est devenu "Smells Like Teen Spirit" tout en sautillant le poing en l'air.

A cette harangue finale de la foule, Patti Smith introduira "People Have the Power" en soulignant son "privilège de chanter pas seulement pour les gens, mais aussi pour les nuages et les arbres" tout en pointant au loin le Jura et le ciel qu'elle a devant elle sur la plaine de l'Asse.

Encore une fois, dans sa seule voix, habitée ou militante, fervente ou intimiste, Patti Smith a porté comme rarement l'amour, la mort, la poésie mais aussi l'espoir et la contestation. Le propre des icônes.

>> A consulter, le dossier consacré au 47e Paléo Festival : Suivi de la 47e édition du Paléo Festival qui ouvre ses portes mardi

Olivier Horner

Publié Modifié