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Patti Smith livre ses incantations punk à la vie au Montreux Jazz

Patti Smith, une des rares femmes à faire vibrer le punk-rock sur scène depuis les années 1970. [MJF/Lionel Flusin]
Patti Smith, une des rares femmes à faire vibrer le punk-rock sur scène depuis les années 1970. - [MJF/Lionel Flusin]
La poétesse et chanteuse américaine Patti Smith, icône féminine du punk des années 1970, a ravi l'Auditorium Stravinski du Montreux Jazz Festival mercredi soir avec un show rock'n'roll solaire.

Tout commence avec un discret claquement de doigts, de longs cheveux d'argent qui se balancent, une bottine noire qui frappe le sol, puis les mains se secouent, tremblent, s'écartent pour finalement se rejoindre en prière. Une incantation rock accompagnée d'une voix puissante et intense qui va durer une heure et demie.

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Voir Patti Smith sur scène, c'est assister à une incantation à la vie. Lors de ses quelques interventions, la musicienne n'aura de cesse de répéter au public l'importance d'être uni dans ce monde troublé et sans équilibre. Une ode à la communion qui se déclame toutefois sur des riffs punk-rock avec une voix rauque et une énergie contestataire.

Du haut de ses 69 printemps, l'artiste new-yorkaise n'a rien perdu de sa fougue. Après deux chansons aux accents folk, elle revient rapidement à son album des débuts, "Horses", un album vieux de plus de 40 ans qui n'a pas pris une ride, avec le titre "Free Money". La chanson évoque ses années de dèche au Chelsea Hotel, une époque racontée par Patti Smith l'écrivaine dans "Just Kids", son autobiographie publiée en 2010. Après les quelques élans lyriques du piano de Tony Shanahan, la batterie de Jay Dee Daughterty, comparse des débuts, vient réveiller le public, qui a sûrement plus en poche que les quelques "dollars bills" de la jeune poète d'alors.

Fantômes célèbres et dédicaces

Au son du tambourin, la chanteuse entame ensuite une émouvante "Ghost Dance" (danse de fantôme), un texte en mémoire de ses ancêtres amérindiens, qu'elle a dédié mercredi soir à Claude Nobs. Quand suit "When Doves Cry", une reprise du titre de Prince, la salle est définitivement conquise.

Mémoire et références de légende se succèdent ensuite avec notamment une chanson de Velvet Underground, qui fait une belle place à la guitare de Lenny Kaye, autre collaborateur et ami de toujours de "Patti". Le titre précède "Because the Night", chanson dédiée à son défunt mari le musicien Fred "Sonic" Smith. La salle résonne de "We love you" et autres "You're awesome". La voix vacille, une gorgée d'eau, puis vient le moment de la transe.

"Trop de gens sont morts récemment. On ne les connaît pas, on ne sait pas leurs noms, mais ils font partie de l'humanité, j'aimerais leur offrir cette chanson", tonne Patti Smith qui évoque les tragédies des migrants en se lançant dans un poème enragé.

Des chevaux endiablés

Quelques poèmes saupoudrés de sonorités blues, funk et même reggae plus tard et il est temps de redonner le pouvoir au peuple... Avec son titre phare "People have the power", la chanteuse invite chacun à faire un geste pour la planète.

Dansant sans réserve, se déhanchant et balançant sa crinière d'acier, Patti Smith clôt son show d'un final époustouflant avec plus de 10 minutes d'un "Horses/Land/Gloria" possédé.

Sans rappel, Patti Smith s'efface doucement de scène, comme elle est entrée, pour laisser place à une autre prêtresse du rock, PJ Harvey, oiseau de nuit dark qui entre en scène sous les roulements de tambours pour un set intense. Pour répondre à l'appel de communion de Patti Smith, l'Anglaise entame un show hypnotisant avec "Community of hope".

Sophie Badoux

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