Quinze ans après les attentats de New York, zoom sur la musique du 11-Septembre. Un décryptage de l'animatrice Ellen Ichters.
11 septembre 2001, Super Tuesday meurtrier
Ce mardi-là, l'Amérique vivait ce que l'on appelle dans le monde économique un Super Tuesday, date annuelle prévue par les majors pour regrouper les sorties de disques les plus importantes de l'année.
Le 11 septembre 2001 Noir Désir sortait "Des Visages des Figures" l'album sur lequel figurait ce titre prémonitoire, "Le Grand Incendie", évoquant le monde en flammes. Le timing ne pouvait être pire...
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Des coïncidences malheureuses
Ce mardi-là, de nombreux fans se préparaient à l'acquisition des nouveaux albums de Bob Dylan, de Jay-Z, mais aussi du groupe de trash metal Slayer, dont le nom laissait rêveur: "God Hates Us All" (Dieu nous hait tous).
À noter également la sortie de Live Scenes from New York, dont la pochette – coïncidence malheureuse – affichait la skyline de New York en flammes.
Le groupe de rap The Coup prévoyaient de se mettre en scène en faisant exploser les Twin Towers, grâce à des effets spéciaux.
La musique allait être l'un des premiers secteurs à pâtir après les attentats du 11 septembre. Les artistes, sommés de se positionner pour ou contre la nation à travers leurs titres, devront approuver la politique sécuritaire. Ou se taire.
Dès le lendemain du drame les radio reçoivent le 2001 Clear Channel Memorandum, soit une liste de titres déconseillés à l'antenne. Il s'agissait de morceaux ayant un lien moins direct avec la mort et la tragédie que d'autres ("Hells Bells" d'AC/DC ou encore "Ironic", d'Alanis Morrissette) mais surtout tous les titres comportant les mots "fire", "attack", "bomb", ou "shot".
Une destruction prémonitoire
Dans son livre "Ground Zero, une histoire musicale du 11 Septembre", l'auteur Jean-Marie Pottier évoque la place de cet événement dans la musique, mais aussi l'intérêt suscité dans la musique par les Twin Towers elles-mêmes, dès leur construction dans les années 70.
Un livre qui permet de comprendre pourquoi et comment plusieurs chansons, images, illustrations et scénarii catastrophes de comics américains ont pu paraître prémonitoires au moment des attaques, parce qu'ils mettaient en scène la destruction des tours par des avions ou par le feu, bien avant la tragédie.
Déjà avant de faire parler d'elles dans des albums dédiés aux victimes du célèbre attentats, comme ce fut le cas dans l'album "The Rising", de Bruce Springsteen, les deux tours du World Trade Center ont intrigué par leur présence les musiciens de tous horizons musicaux.
Les amateurs de Bach ont été inspirés par une autre coïncidence, celle des initiales des deux tours WTC (pour World Trade Center), qui sont aussi les initiales de l'œuvre imposante de Bach, le Well Tempered Clavier (le clavier bien tempéré). Le compositeur Lalo Schifrin dédiera son album "Towering Toccata" en 1976 à ce rapprochement.
Le World Trade Center pouvait lui-même être un instrument à corde, ou à vent, comme deux gigantesques instruments rectangulaires capables de produire des notes et des mélodies.
Des tours qui inspirent
La hauteur des deux bâtiments a attisé la curiosité créatrice de nombreux artistes contemporains.
En 1974 déjà, le Français Philippe Petit, connu pour ses "performances" à travers le monde, accomplit un rêve de gosse: tendre un fil et passer entre les deux tours du World Trade Center en toute illégalité. Un documentaire retrace l'histoire du "crime artistique du siècle".
>>Bande-annonce du documentaire "Le funambule":
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En 1999 on offre à des artistes américains une résidence au sommet des tours. Ils vont mettre en scène, ou en son, le gigantisme du bâtiment et sa structure capable de générer sa propre musique.
Des sons de porte comme autant de percussions, qui finissaient par faire croire que les tours respiraient ou que leurs cœurs battaient. Certains artistes ont mélangé des chants d'esclaves dans les champs de coton à un fond musical genre muzak.
En 1999, Stephen Vitiello, musicien et sound artist, s'installe au 91e étage de la Tour 1 du World Trade Center et enregistre, à l'aide de capteurs qu'il dispose sur les parois de verre, divers sons environnants la tour: le trafic new-yorkais, les avions, les vibrations des parois en verre, ou encore les oscillations des structures métalliques.
Il capte quelques instants, devenus historiques, de la vie des deux tours. C'était quelques semaines après le passage de l'ouragan Floyd.
>>Découvrez l'émission "Pl3in le poste" sur Couleur 3 avec, notamment, une interview de Jean-Marie Pottier, auteur de "Ground Zero, une histoire musicale du 11 septembre" :
Du rock au hip-hop, des musiques classiques et savantes au jazz, de Bob Dylan à Steve Reich et de Jay-Z à Radiohead, "Ground Zero, une histoire musicale du 11 Septembre" raconte comment un événement peut frapper de plein fouet la musique puis comment la musique peut essayer de digérer, s’approprier et surmonter cet événement.
Un récit qui s'étend sur plus d'une décennie et trouve son prolongement tragique jusqu'à nos jours et les attaques terroristes du 13 novembre 2015 en France.
Telle sera notre réponse à la violence : jouer de la musique avec encore plus d’intensité, plus de beauté et plus de dévouement qu’auparavant.