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A Antigel, l'illustre Kronos Quartet convainc par intermittence

Le Kronos Quartet sur la scène du Victoria Hall, à Genève, le 18 février 2017. [Antigel/François Blin]
Le Kronos Quartet sur la scène du Victoria Hall, à Genève, le 18 février 2017. - [Antigel/François Blin]
L'illustre quatuor américain Kronos, fervent défenseur de la musique d'aujourd'hui, s'est produit samedi soir au Victoria Hall, dans le cadre du festival Antigel. Il a convaincu, par intermittence.

Cosmopolite, pacifiste, défricheur. On ne saurait reprocher au quatuor Kronos de manquer de cohérence dans le programme qu'il offrait aux festivaliers d'Antigel, samedi 18 février. Panorama format mondial, d'abord.

Au Victoria Hall, un air du chanteur syrien Omar Souleyman ouvre le concert, des compositions d'inspiration malienne, indienne, ou encore chinoise suivent. La formation s'efforce, et plutôt bien, d'adapter son phrasé à ces différents répertoires.

Message de résistance

Politiquement, Kronos promeut un message de tolérance et de résistance. En jouant par exemple un arrangement de "Strange Fruit", chanté notamment par Billie Holiday – le fruit en question est un Noir, lynché, qui se balance suspendu à un arbre. Sur scène, le violoniste David Harrington annonce que ce morceau est "pile au cœur des problèmes que les Etats-Unis connaissent en ce moment".

S'y ajoute une pièce mettant en scène les manifestations à l'aéroport de New York qui ont suivi le "travel ban" institué par Donald Trump le 27 janvier. Ou encore "Bombs of Beirut" de Mary Kouyoumdjian qui emploie des témoignages de survivants de la guerre du Liban. Œuvre édifiante mais sans intérêt musical.

Do-it-yourself à cordes

Le Kronos Quartet étend sans cesse le répertoire pour quatuor, lui qui a commandé des centaines de pièces à des compositeurs d'aujourd'hui. "Fifty for the Future", son dernier projet était à l'honneur quatre fois à Genève: une cinquantaine (!) de commandes en cours d'écriture qui sont mises gratuitement en ligne à disposition de qui veut les jouer.

A deux reprises, David Harrington suggère au public de s'y atteler! L'essai est parfois transformé: ainsi d'"Amrit", roboratif interlude de la compositrice Kala Ramnath, entre Bach et Bombay.

Le sublime côtoie l'anecdotique

Mais les meilleures intentions n'engagent pas le résultat artistique. Samedi, le sublime a côtoyé l'anecdotique. Dans le même concert, on entendait le premier quatuor de Górecki, apocalyptique, remarquable, et les "Béatitudes" de Vladimir Martynov, sucrerie inepte et sentimentale. Etonnante disparité d'un programme cohérent, certes, mais terriblement inégal.

Reste l'enthousiasme communicatif des musiciens américains et la capacité, indéniable, du quatuor Kronos de toucher un public bien plus large que celui d'un ensemble "classique" de musique de chambre.

Benoît Perrier/olhor

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